Comprendre l'intérêt de la planification financière, et ses outils. □ Comprendre ...
3.10 La gestion du BFR (besoin en fonds de roulement). 3.11 Gestion de la ...
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CHAPITRE
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L’interprétation des documents financiers et la planification financière
OBJECTIFS ■ Comparer les visions économique et comptable de l’entreprise. ■ Montrer comment l’information comptable peut être utile au décideur financier s’il en use avec précaution. ■ Comprendre l’intérêt de la planification financière, et ses outils. ■ Comprendre pourquoi les entreprises ont un besoin en fonds de roulement (BFR), et comment l’optimiser pour maximiser la valeur pour l’actionnaire.
PLAN 3.1 3.2 3.3 3.4 3.5 3.6 3.7 3.8 3.9 3.10 3.11
L’utilité des documents financiers L’analyse des documents financiers Valeurs de marché et valeurs comptables Mesure comptable et mesure économique des revenus Rentabilité boursière et rentabilité financière (ou comptable) L’analyse par les ratios La planification financière Comment bâtir un plan de financement La croissance et les besoins de financement externes La gestion du BFR (besoin en fonds de roulement) Gestion de la liquidité et gestion de trésorerie
RÉSUMÉ Les documents financiers (ou états financiers) servent à trois objectifs économiques importants : • Ils fournissent des informations aux actionnaires et créanciers de l’entreprise sur la situation actuelle et les performances passées de la société.
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• Ils représentent un moyen facile, pour les actionnaires et les créanciers, de fixer des objectifs de performance et d’imposer des restrictions aux dirigeants de l’entreprise. • Ils constituent une base pour la planification financière. Les principaux documents financiers sont le compte de résultat, le bilan et le tableau des flux de trésorerie. Le compte de résultat donne les résultats de la société sur un exercice, et est constitué selon le modèle « produits moins charges (y compris les amortissements et provisions) égalent le résultat net ». Le bilan détaille l’actif (actif immobilisé, actif circulant) et le passif (capitaux propres et dettes). Le tableau des flux de trésorerie donne un résumé des flux de trésorerie (cash-flows), dégagés ou consommés, par les activités d’exploitation, d’investissement et de financement. Le bilan comptable d’une entreprise diffère de son bilan économique parce que : • Le bilan comptable ignore certains actifs et passifs qui sont pourtant importants. • Dans le bilan comptable, les actifs et passifs ne sont pas tous enregistrés à leur valeur de marché. Les analystes financiers utilisent les ratios pour mieux comprendre les forces et faiblesses d’une entreprise, pour évaluer ses chances et ses enjeux futurs. Ces ratios sont souvent comparés à ceux de sociétés comparables, ou rapportés aux années antérieures. Il y a cinq types de ratios, qui mesurent la profitabilité, la rotation des actifs, l’endettement, la liquidité, et la valeur de marché de la société. Il faut souvent organiser l’analyse financière de façon linéaire, en montrant les relations entre les différents ratios, et leur rapport avec le métier et les choix de l’entreprise. Le but de la planification financière est de rassembler les planifications des différentes divisions en un seul document homogène, d’établir des objectifs précis pour quantifier la performance, et de prévoir des primes pour atteindre les objectifs. Le processus de planification financière produit régulièrement des budgets et des bilans et comptes de résultats prévisionnels. Plus l’horizon de prévision est éloigné, plus les documents prévisionnels sont synthétiques. À court terme, la planification financière consiste essentiellement à gérer le besoin en fonds de roulement (BFR). Le BFR est un besoin d’investissement dû au fait que, pour la plupart des entreprises, il faut d’abord engager des dépenses d’achats, de production et de vente, avant de toucher les recettes de ces ventes. Plus ce délai de crédit interentreprises est long, plus la société a besoin d’un BFR important. Le BFR se calcule comme la somme des stocks, créances clients, acomptes aux fournisseurs et autres créances moins les dettes fournisseurs, les dettes fiscales et sociales, les acomptes des clients et les autres dettes. Le maître mot pour gérer correctement son BFR est qu’il faut minimiser l’investissement dans les actifs peu rémunérateurs comme les stocks et les créances clients, et maximiser le recours aux passifs peu coûteux, comme les acomptes des clients et les dettes d’exploitation. La gestion de trésorerie est vitale, car une société très rentable peut éprouver des difficultés financières, voire faire faillite, si elle est en situation d’illiquidité.
MOTS CLÉS Valeurs comptables • actifs immatériels • survaleur ou goodwill • rentabilité de l’action • rentabilité boursière • méthode du pourcentage des ventes • potentiel de croissance • besoin en fonds de roulement (BFR) • crédit interentreprises • liquidité • illiquidité • budget de trésorerie • plan de trésorerie.
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n général, la majorité de l’information portant sur les sociétés et autres organisations financières est fournie sous la forme de documents financiers standardisés que ces sociétés publient pour leurs actionnaires, à un rythme annuel ou trimestriel. Ces documents financiers, c’est-à-dire les bilans, comptes de résultat et tableaux de financement, sont établis en fonction des normes comptables édictées par les organismes comptables, aussi est-il important de connaître ces normes. Toutefois, il arrive que les analystes financiers ne soient pas d’accord avec les méthodes proposées par les comptables. Les désaccords les plus importants portent sur la façon d’évaluer les actifs et les passifs d’une société. Dans ce chapitre, nous analysons des documents financiers simples, et nous montrons comment utiliser ces documents comme points de départ pour la planification financière. Nous débutons par la revue des règles comptables courantes. Puis nous montrons comment les mesures comptables de la valeur et des revenus peuvent différer des approches économiques nécessaires à la prise de bonnes décisions financières. Nous bâtissons alors le plan de financement d’une entreprise industrielle classique, en partant des documents financiers de l’entreprise sur les dernières années. Enfin, nous évoquons la planification financière à court terme et la gestion du besoin en fonds de roulement (BFR).
3.1 L’UTILITÉ DES DOCUMENTS FINANCIERS Les documents financiers (ou états financiers) servent à trois objectifs économiques importants : • Ils fournissent des informations aux actionnaires et créanciers de l’entreprise sur la situation actuelle et les performances passées de la société. Bien que les rapports financiers publiés par les sociétés fournissent souvent trop peu d’informations pour que l’on puisse juger précisément de leur performance, ces rapports peuvent fournir des indices importants sur les activités de l’entreprise et permettent de démarrer une analyse plus attentive. Parfois, une analyse approfondie des documents financiers permet de détecter des fautes de gestion, voire des fraudes (cf. Encadré 3.1). • Les documents financiers représentent un moyen facile, pour les actionnaires et les créanciers financiers, de fixer des objectifs de performance et d’imposer des restrictions aux dirigeants de l’entreprise. Les documents financiers servent au conseil d’administration à fixer des objectifs aux dirigeants. Par exemple, le conseil d’administration peut fixer un objectif en terme de taux de croissance du résultat net, ou bien un certain niveau de rentabilité des capitaux propres (rentabilité pour l’actionnaire). D’autre part, les créanciers (par exemple les banquiers) restreignent souvent la liberté des dirigeants en fixant certaines limites, par exemple un montant maximum du rapport entre les actifs à court terme et les passifs à court terme.
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• Les documents financiers constituent une base pour la planification financière. En bâtissant des comptes de résultat, bilans et tableaux de flux de trésorerie prévisionnels, les dirigeants peuvent déterminer les besoins de financement globaux de la société. Cette vision globale permet aussi de juger de la cohérence des différents projets d’investissement qui ont été décidés séparément. Certes, on pourrait utiliser d’autres modèles prévisionnels pour réaliser la planification financière, mais l’avantage des bilans, compte de résultat et tableaux des flux de trésorerie prévisionnels est que ce sont des documents déjà connus de la plupart des salariés.
Test 3.1
Quelles sont les trois fonctions principales des documents financiers ?
Encadré 3.1 Irrégularités comptables et crises financières Les années 2000-2010 ont été marquées par une série de scandales financiers, qui remettent en cause la qualité des informations comptables publiées par certains grands groupes cotés. Parfois, la responsabilité des cabinets d’audit a été engagée, et cela a notamment conduit à la disparition d’Arthur Andersen aux États-Unis, suite à l’affaire Enron.
avant la clôture de ses comptes, elle cédait à une entreprise amie des actifs immobiliers... et les rachetait juste après la clôture des comptes. Les disponibilités – très temporaires – qu’elle avait obtenues lui permettaient de compenser des dettes et de publier un endettement bien inférieur à son endettement réel.
Dans le cas d’Enron, des montages déconsolidants avaient été pratiqués : des actifs de faible qualité avaient été sortis du bilan, en utilisant des fonds de créances (special purpose vehicle) pour qu’ils n’apparaissent plus dans les comptes du groupe. L’image était plus flatteuse, mais fausse.
Deux histoires de sorties d’actifs du bilan, dans une optique claire de masquage des comptes. Et une question finale : pourquoi ces opérations n’ont-elles pas été détectées avant la faillite ? Il semble que toutes les étapes ont connu des inefficiences : que ce soit au niveau de la production d’informations comptables, de la validation des rapports annuels, puis de la lecture par les analystes, ces montages n’ont pas été détectés comme tels. Les activités des groupes requièrent désormais une vigilance et une technicité de plus en plus grandes de la part des analystes.
En 2008, la banque Lehman Brothers a fait faillite, entraînant une crise financière sans précédent. Pourtant, ses comptes de l’année précédente faisaient apparaître des chiffres record. En fait, la banque pratiquait des opérations de rachat : quelques jours
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3.2 L’ANALYSE DES DOCUMENTS FINANCIERS Pour détailler les trois principaux documents financiers, nous allons prendre l’exemple fictif de la Compagnie des Produits Génériques (ProdGen). ProdGen est une société qui a été fondée il y a 10 ans pour produire et vendre des produits génériques (c’est-à-dire sans marque) aux consommateurs. Les tableaux 3.1, 3.2 et 3.3 montrent le bilan, le compte de résultat et le tableau des flux de trésorerie de ProdGen. Ceux-ci sont assez typiques d’une société européenne. Détaillons chaque document.
3.2.1 Le bilan Le bilan d’une société montre son actif (ce qu’elle possède) et ses dettes (ce qu’elle doit) à une date donnée. La différence entre l’actif et les dettes correspond à la situation nette, qu’on appelle aussi capitaux propres. La valeur des actifs, des dettes et des capitaux propres est inscrite dans le bilan à sa valeur historique (c’est-à-dire sa valeur du jour d’entrée dans le bilan). Cela est conforme aux normes comptables en vigueur, telles qu’elles sont édictées en France par le Conseil National de la Comptabilité1. En règle générale, une société qui désire s’implanter dans un pays étranger, ou faire coter ses actions sur une Bourse étrangère, doit publier régulièrement des documents financiers en respectant les normes comptables du pays considéré. Le tableau 3.1 présente deux bilans successifs de ProdGen, à la fin de l’année N – 1 et à la fin de l’année N. Examinons le bilan au 31 décembre N – 1, juste avant le début de l’année N. La première partie du bilan indique les actifs de la société, en commençant par l’actif immobilisé. Celui-ci comprend les immobilisations corporelles (machines, bâtiments, terrains, outillage) et incorporelles (brevets, frais de recherche-développement, logiciels, marques, etc.). La valeur de ces actifs immobilisés, nette des amortissements et provisions, est de 300 millions d’euros. Ensuite sont détaillés les actifs circulants, c’est-à-dire les actifs liquides (argent disponible) ou qui seront liquides (c’est-à-dire transformés en argent) dans l’année. Les actifs circulants comprennent les stocks, les créances clients, les disponibilités. Les stocks, soit 150 millions d’euros, sont constitués de stocks de matières premières, d’en-cours ou produits semi-finis, et de produits finis. Les créances clients représentent 50 millions d’euros, et correspondent à l’argent que les clients doivent à ProdGen (en d’autres termes, ProdGen a livré des produits à ses clients, les clients ont été facturés, mais certains clients n’ont pas encore réglé leur facture). Enfin, les disponibilités représentent 100 millions d’euros. Ces disponibilités sont constituées des montants disponibles sur les comptes bancaires de l’entreprise, plus les disponibilités placées en Bourse (qu’on appelle valeurs mobilières de placement, ou VMP). Le total de tous les actifs s’élève à 600 millions d’euros. Ensuite est détaillé le passif de ProdGen, divisé en capitaux propres et en dettes exigibles. Les capitaux propres, d’un montant de 300 millions d’euros, sont composés du capital social et des réserves. Le capital social (200 millions) correspond au montant apporté par les actionnaires lors des différentes émissions d’actions. Les réserves (100 millions) représentent la somme des résultats passés qui a été laissée dans l’entreprise (par opposition aux dividendes, qui sont la part des résultats qui a été distribuée, donc qui a quitté l’entreprise). © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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TABLEAU 3.1 Bilan de ProdGen au 31 décembre ACTIF
N–1
N
Variation
Actif immobilisé Amortissements et provisions Actif immobilisé net
400 100 300
490 130 360
90 30 60
Actifs circulants Stocks Créances d’exploitation Disponibilités Total des actifs circulants
150 50 100 300
180 60 120 360
30 10 20 60
Total de l’actif
600
720
120
300 200 100
313 200 113
13 0 13
PASSIF Capitaux propres (1 million d’actions) Capital social Réserves Passif exigible Dettes financières à long ou moyen terme (obligations à 8 %, maturité N + 7) Dettes d’exploitation Dettes financières à court terme Passif exigible total
150
150
0
60 90 300
72 185 405
12 95 107
Total du passif
600
720
120
Information complémentaire : Cours boursier de l’action
200 euros
187,20 euros – 12,80 euros
Sauf indication contraire, tous les chiffres sont en millions d’euros.
Les dettes exigibles sont dissociées en dettes financières (c’est-à-dire qui supportent un taux d’intérêt) à long, moyen et court terme, et en dettes d’exploitation. Les dettes à long ou moyen terme (150 millions) sont des obligations émises par la société, dont la date d’échéance (donc de remboursement définitif) est en N + 7. Le taux d’intérêt de ces obligations est de 8 % par an, ce qui signifie que chaque année, la société paye 12 millions d’euros en intérêts sur cet emprunt obligataire (pour une obligation, on parle d’intérêts ou de coupons). Ces intérêts sont présents dans le compte de résultat de ProdGen. Les dettes d’exploitation représentent l’argent que ProdGen doit à ses fournisseurs, à son personnel et à l’État (pour ces deux dernières dettes, on parle aussi de dettes fiscales et sociales). Enfin, ProdGen a 90 millions d’euros de dettes financières à court terme (des concours bancaires, des découverts, des crédits d’exploitation, etc.). Bien que ces indicateurs n’apparaissent pas explicitement dans le bilan, on peut calculer aussi le fonds de roulement (FDR), le besoin en fonds de roulement (BFR) © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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et la trésorerie nette (TN). Le fonds de roulement est égal à la différence entre les capitaux permanents (capitaux propres + dettes financières à long ou moyen terme) et l’actif immobilisé. Il correspond à l’excédent des ressources stables sur les besoins stables. Le FDR de ProdGen est ici de 300 + 150 – 300 = 150 millions d’euros. Le besoin en fonds de roulement correspond à la différence entre les actifs d’exploitation (stocks + créances clients) et les passifs d’exploitation (dettes d’exploitation). Il correspond au besoin d’argent issu de l’activité de l’entreprise, c’est-à-dire le montant dépensé pour mener à bien la production actuelle. Le BFR de ProdGen est de 150 + 50 – 60 = 140 millions d’euros. On constate que le fonds de roulement (excédent) couvre ici le besoin en fonds de roulement (besoin), ce qui est conforme à une gestion équilibrée. Enfin, la trésorerie correspond à la différence entre les disponibilités et les dettes financières à court terme. Une trésorerie négative indique une crise de trésorerie potentielle, c’est-à-dire une incapacité à honorer toutes ses dettes exigibles à court terme. La trésorerie de ProdGen est de 100 – 90 = 10 millions d’euros. Comme on a total de l’actif = total du passif, on a aussi FDR – BFR = Trésorerie Nette (150 – 140 = 10). Analysons maintenant les variations du bilan entre le 31 décembre N – 1 et le 31 décembre N. Pendant cette année, tous les actifs ont augmenté de 20 %, de même que les dettes d’exploitation. Les dettes financières à court terme ont augmenté de 94,6 millions d’euros, tandis que les dettes financières à long ou moyen terme restaient stables à 150 millions. Les capitaux propres ont augmenté de 13,4 millions, ce qui correspond au résultat dégagé et non distribué par la société sur l’année. Par ailleurs, il n’y a eu aucune augmentation de capital, donc le capital social est resté le même.
Test 3.2 Si ProdGen avait émis un nouvel emprunt obligataire à long terme de 50 millions d’euros pendant l’année N, et versé le montant ainsi collecté en disponibilités, quel aurait été l’impact sur le bilan à la fin de l’année N ?
3.2.2 Le compte de résultat Le compte de résultat montre la profitabilité d’une société sur une période donnée, généralement une année. Les termes résultat ou profit signifient la même chose, c’est-à-dire la différence entre les recettes (le comptable parle de produits) et les dépenses (le comptable parle de charges). Le compte de résultat est aussi appelé compte de profits et pertes (ou PnL pour Profit ‘n Loss Statement). Le tableau 3.2 montre qu’en N, ProdGen a réalisé des ventes pour 200 millions d’euros et son résultat net est de 23,4 millions2. Les dépenses de ProdGen sont classées en quatre grandes catégories. La première s’intitule « achats et autres charges externes », soit 110 millions. Ce poste englobe tous les achats de biens, fournitures et services réalisés auprès de fournisseurs extérieurs (fournisseurs de matières premières, transport, énergie, téléphone, publicité, etc.). La plupart des achats sont directement liés à la production de ProdGen. La différence entre les ventes (ou chiffre d’affaires, CA) et les achats et autres charges externes est appelée la valeur ajoutée (VA). La valeur ajoutée de ProdGen est ici de 90 millions. © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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La seconde catégorie de dépenses est composée des salaires et autres charges d’exploitation. Alors que les achats et autres charges externes étaient des dépenses vis-àvis de partenaires extérieurs à l’entreprise (des fournisseurs), les salaires et autres charges d’exploitation correspondent à des dépenses internes à l’entreprise (paiement des salaires de tous les employés, amortissement des machines). La différence entre la valeur ajoutée et les salaires et autres charges d’exploitation est appelée résultat d’exploitation (RE)3. Les dépenses de salaires et autres charges d’exploitation de ProdGen étant de 30 millions, le résultat d’exploitation est donc de 60 millions. TABLEAU 3.2 Compte de résultat de ProdGen pour l’année N Ventes Achats et autres charges externes Valeur ajoutée (VA) Salaires et autres charges d’exploitation Résultat d’exploitation (RE) Charges financières Résultat courant avant impôt (RCAI) Impôt sur les sociétés (IS) Résultat net Bénéfice par action (pour 1 million d’actions) Répartition du bénéfice par action : Dividendes Affectation en réserves
200,0 – 110,0 90,0 – 30,0 60,0 – 21,0 39,0 – 15,6 23,4 23,4 euros 10,0 euros 13,4 euros
Sauf indication contraire, tous les chiffres sont en millions d’euros.
La troisième catégorie de dépenses est composée du résultat financier, c’est-àdire les produits et charges issus des opérations financières de l’entreprise : ici, seules les charges financières, c’est-à-dire les intérêts sur dettes, sont mentionnés. Ces intérêts sur dettes sont souvent le poste le plus important des opérations financières. Le résultat financier (non présenté explicitement ici) est de – 21 millions d’euros. En additionnant le résultat d’exploitation et le résultat financier, on obtient le résultat courant avant impôt (RCAI). Le RCAI de ProdGen est de 39 millions. La quatrième et dernière catégorie de dépenses est l’impôt sur les sociétés (IS). ProdGen est assujettie à un taux d’IS de 40 %, ce qui signifie un IS de 15,6 millions. Le résultat net de ProdGen s’établit donc à 23,4 millions d’euros4. Comme il y a 1 million d’actions ProdGen, le bénéfice par action (BPA) est de 23,4 euros. Le compte de résultat montre aussi que ProdGen a payé 10 millions de dividendes en N. Cela signifie que, sur le résultat net de 23,4, la société a gardé 13,4 millions qui ont été mis en réserves, et qui viennent ainsi augmenter les capitaux propres de la société dans le bilan à la fin de l’année N. Notons que ce montant de 13,4 n’apparaît pas précisément dans les disponibilités au bilan, car le résultat net n’est pas un cash-flow (Cf. section suivante).
Test 3.3 Si, au lieu de payer 10 millions de dividendes, la société ProdGen avait conservé la totalité de son résultat net, quel aurait été l’impact sur le compte de résultat et le bilan à la fin N ?
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3.2.3 Le tableau des flux de trésorerie Le tableau des flux de trésorerie montre tous les transferts d’argent dans une société sur une période donnée, que cet argent arrive sur le compte bancaire de la société (ressource) ou quitte le compte bancaire de la société (emploi). On parle aussi de tableau d’emplois-ressources, de tableau de financement, ou de tableau de variation du fonds de roulement. Ce tableau des flux de trésorerie diffère du compte de résultat, dans la mesure où (1) il inclut des opérations qui n’étaient pas présentes dans le compte de résultat (par exemple, les variations de certains postes du bilan, comme les remboursements de dettes) ; (2) il n’inclut pas certaines opérations du compte de résultat (toutes les opérations qui ne se traduisent pas par un flux d’argent, par exemple les amortissements, les provisions). Le tableau des flux de trésorerie est un complément utile au compte de résultat pour deux raisons. D’abord, il se focalise sur le compte bancaire (la trésorerie) de l’entreprise au fil du temps. Or, même les sociétés les plus rentables peuvent faire faillite si elles n’ont plus de disponibilités sur leur compte bancaire. Bâtir un tableau des flux de trésorerie permet aux dirigeants et aux partenaires externes à l’entreprise de voir si l’entreprise engrange des disponibilités ou en consomme, et de comprendre pourquoi. Par exemple, il arrive souvent que les sociétés rentables et en forte croissance se retrouvent – du fait de cette forte croissance – avec un compte bancaire négatif, et éprouvent ainsi des difficultés à tenir leurs engagements. Le tableau des flux de trésorerie est aussi utile parce qu’il ne prend pas en compte certains jugements subjectifs qui affectent le compte de résultat : en effet, dans le compte de résultat, un produit ne correspond pas toujours à une entrée d’argent (on parle de produit non encaissable), et une charge ne signifie pas toujours une sortie d’argent (on parle de charge non décaissable). Le résultat net affiché dépend ainsi de la manière dont les dirigeants vont choisir d’évaluer certains produits et charges non encaissables/non décaissables, par exemple les amortissements des immobilisations incorporelles et corporelles, les provisions, les variations de stocks. Le tableau des flux de trésorerie n’est pas affecté par ces choix comptables. Par conséquent, en comparant le compte de résultat et le tableau des flux de trésorerie, un analyste pourra déterminer l’impact de ces choix comptables sur le résultat. Illustrons nos propos en analysant le tableau 3.3, qui représente le tableau des flux de trésorerie de ProdGen pour l’année N. Ce tableau organise les flux d’argent en trois catégories : les flux d’exploitation, les flux financiers, les flux d’investissement. Détaillons ces trois catégories. Les flux d’exploitation sont constitués des ressources d’argent qui viennent de la vente des produits de ProdGen, moins les emplois d’argent pour payer les achats, les salariés, etc. Le solde de ces flux d’exploitation sera appelé cash-flow, ou excédent de trésorerie global. Le cash-flow dégagé par ProdGen en N est de 25,4 millions d’euros, alors que le résultat net est de 23,4 millions. D’où vient la différence entre ces deux chiffres ? Il y a quatre postes qui peuvent expliquer la différence entre le résultat net et le cash-flow : les amortissements et provisions, la variation des créances clients, la variation des stocks, la variation des dettes d’exploitation. Analysons ces quatre postes pour la compagnie ProdGen dans l’année N. D’abord, les amortissements et provisions étaient de 30 millions en N (ici, ces 30 sont uniquement des amortissements ; il n’y a pas de provisions mentionnées). Ceci © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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est une charge non décaissable qui a été déduite des produits dans le compte de résultat. Or, cette charge ne correspond pas à une dépense monétaire réelle : la vraie dépense concernant les immobilisations, c’est l’argent qui a été déboursé initialement pour acheter les immobilisations. L’amortissement n’est qu’une écriture comptable pour répartir cette dépense initiale sur la durée de vie des immobilisations. Aussi, comme l’amortissement n’est qu’une écriture ne correspondant pas à une dépense réelle, mais que cette charge a été déduite dans le compte de résultat, nous devons ajouter l’amortissement au résultat net pour calculer le cash-flow. TABLEAU 3.3 Tableau des flux de trésorerie de ProdGen pour l’année N Flux d’exploitation Résultat net + amortissements – augmentation des créances clients – augmentation des stocks + augmentation des dettes d’exploitation Excédent de trésorerie global
23,4 + 30,0 – 10,0 – 30,0 + 12,0 25,4
Flux d’investissement – investissement en immobilisations
– 90,0
Flux financiers – dividendes payés + augmentation des dettes financières
– 10,0 + 94,6
Variation des disponibilités
20,0
Tous les chiffres sont en millions d’euros.
Le second poste est la variation du compte créances clients (la variation correspond ici à une augmentation du compte créances clients de 10 millions sur l’année). Cela correspond à la différence entre les ventes facturées aux clients (et donc comptabilisées) et l’argent effectivement collecté sur ces ventes. Dans le compte de résultat, le chiffre d’affaires de 200 signifie que ProdGen a livré et facturé pour 200 millions d’euros de biens et services sur l’année N. Mais la société n’a reçu que 190 sur ces ventes : les 10 de différence sont probablement dus aux délais de paiement accordés aux clients. Comme ces 10 millions correspondent à des factures de N non réglées, ils sont venus augmenter le compte créances clients. Aussi, comme le résultat net était calculé sur la foi d’un CA de 200 millions, nous devons retirer cette augmentation du compte créances clients pour obtenir le cash-flow réellement encaissé. Le troisième poste correspond à la variation des stocks, ici une augmentation de 30 millions d’euros. Cela signifie que la valeur des stocks a augmenté de 30 entre N – 1 et N, ou, en d’autres termes, que 30 millions d’argent ont été consacrés à l’achat de matières premières et à des frais de production pour produire des biens qui sont allés augmenter les stocks. Cette dépense de 30 n’est pas incluse dans le compte de résultat. Aussi, pour obtenir le cash-flow réel, nous devons déduire ces 30 millions du résultat net5. Le quatrième poste correspond à une variation des dettes d’exploitation de 12 millions. Cela correspond à la différence entre les achats et autres charges externes comptabilisés dans le compte de résultat (110) et le montant qui a été effectivement payé aux fournisseurs pendant l’année N (98). Pour le calcul du résultat © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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net, les 110 millions ont été intégralement comptés, mais pour calculer le cash-flow, il ne faut déduire que les 98 millions qui ont été effectivement payés aux fournisseurs. Aussi, pour passer du résultat net au cash-flow, il faut ajouter les 12 millions d’augmentation du compte dettes d’exploitation. Nous constatons donc qu’il n’y aucune raison pour qu’il y ait une égalité entre le résultat net et le cash-flow. Pour passer d’un indicateur à l’autre, nous devons tenir compte des quatre postes cités plus haut. Les tableaux de flux de trésorerie seront particulièrement importants si l’on souhaite comparer des sociétés qui publient leurs résultats dans des pays qui ont des règles comptables différentes pour ces quatre postes (Cf. Encadré 3.2). La seconde catégorie du tableau 3.3 – les flux d’investissement – montre la dépense monétaire (l’emploi) de 90 millions pour acquérir des machines, usines, ou autres immobilisations, en N. La troisième catégorie – les flux financiers – établit que ProdGen a déboursé 10 millions en paiement de dividendes, et s’est procuré 94,6 millions en souscrivant à de nouvelles dettes financières (à court terme). En résumé, les opérations d’exploitation, d’investissement, et financières, ont conduit globalement à une augmentation des disponibilités de 20 millions. Les opérations d’exploitation ont généré un flux d’argent de 25,4 millions, et ProdGen a augmenté son endettement de 94,6 millions, donc la société a engrangé un total de 120 millions d’euros en argent. Sur ce montant, 90 millions ont été consacrés à l’investissement en immobilisations, et 10 millions ont été versés en dividendes. Test 3.4 Si, au lieu de payer 10 millions de dividendes, la société ProdGen avait conservé la totalité de son résultat net, quel aurait été l’impact sur le tableau des flux de trésorerie ?
Le tableau 3.4 présente un résumé des caractéristiques des trois documents financiers. TABLEAU 3.4 Synthèse sur les documents financiers Le bilan Actif = capitaux propres + dettes
Le compte de résultat Résultat net = produits – charges
Le tableau des flux de trésorerie Cash-flow total = excédent de trésorerie global + flux financiers + flux d’investissement6
• Une photo à une date donnée de la valeur des actifs et des passifs de l’entreprise. • Les actifs sont enregistrés en coût historique ; les actifs à long terme sont amortis. • Un film des recettes et dépenses sur une période donnée. • L’utilisation d’écritures comptables non monétaires implique que le résultat net n’est généralement pas égal au cash-flow. • Un tableau de flux qui montre quel montant d’argent est arrivé dans l’entreprise durant la période, et quel montant d’argent a quitté l’entreprise. • Les ressources et emplois d’argent sont classés selon trois catégories.
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Encadré 3.2 L’harmonisation des règles comptables L’IASC7, organisme basé a Londres, travaille depuis plus de trente-cinq ans à créer un ensemble unique de normes comptables internationales, que les entreprises de tout pays pourront utiliser pour être cotées sur n’importe quel marché financier de la planète. La situation historique était en effet compliquée pour les sociétés : chaque pays avait son propre système comptable, ce qui n’assurait aucune comparabilité entre les sociétés de pays différents. Les États-Unis agissaient comme un garde-chiourme : toute entreprise non américaine qui souhaitait s’introduire en Bourse aux États-Unis devait soumettre des documents financiers obéissant en tout point aux normes américaines (US GAAP). Beaucoup de pays estimaient qu’ils devaient disposer d’un système commun, conçu et validé par tous. C’est de cette première démarche qu’est né l’IASC (International Accounting Standards Committee) en 1973. Les travaux de ce comité international ont été extrêmement longs, à l’ampleur de la tâche qui était assi-
gnée : arriver à harmoniser dans le respect des différences nationales. Cela a conduit à des normes IAS qui ne tranchaient pas clairement : beaucoup d’entre elles proposaient plusieurs options de traitement comptable, ce qui fait que l’objectif initial (la comparabilité des sociétés) n’était toujours pas atteint. En 2001, l’IASC est devenu l’IASB (International Accounting Standards Board) et les normes comptables ont continué à être amendées. Les normes IAS sont devenues les normes IFRS (International Financial Reporting Standards) et la publication selon ces normes est devenue obligatoire depuis 2005 pour tous les groupes consolidés. Les annexes sont beaucoup plus détaillées, ce qui induit une inflation du nombre de pages des rapports financiers, qui doivent désormais donner des informations plus approfondies sur les actifs et passifs des sociétés, notamment en termes de risques perçus, et de valeurs de marché des engagements.
3.2.4 L’annexe Quand une société publie ses comptes, elle inclut une annexe (ou des Notes) qui détaille les méthodes de comptabilisation qui ont été employées, et décrit la situation financière de la société. Souvent, il y a plus d’informations pertinentes pour comprendre la véritable situation financière de la société dans l’annexe que dans les autres documents financiers (Cf. Encadré 3.3). Voici quelques éléments que l’on trouve régulièrement dans l’annexe : • Une explication des méthodes comptables employées. Les entreprises ont une relative latitude dans la manière de calculer certains coûts, par exemple elles peuvent opter pour l’amortissement linéaire ou dégressif, elles peuvent choisir différents modes de valorisation des stocks (lifo, fifo, cump), elles peuvent décider d’inscrire certaines dépenses à l’actif du bilan. C’est pourquoi l’annexe doit expliquer quelles méthodes spécifiques l’entreprise a employées. De plus, les normes comptables évoluent régulièrement, les sociétés changent de méthodes, et l’annexe leur permet d’indiquer quels auraient été les résultats avec l’ancienne méthode. • Un plus grand détail accordé à certains types d’actifs ou de passifs. L’annexe fournit des détails sur les conditions des dettes (long, moyen et court terme) et leur
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échéancier de remboursement, sur les contrats de crédit-bail, sur l’amortissement des immobilisations (y compris les immobilisations incorporelles). • Une information sur la répartition du capital. L’annexe détaille les différents types d’actions et leurs droits respectifs. Cela peut être particulièrement intéressant pour évaluer la vulnérabilité de la société à une OPA. • Un détail de l’évolution des immobilisations. Les acquisitions réalisées par la société (investissements en machines, usines, rachat de sociétés) ainsi que les désinvestissements (sur des actifs corporels, des titres financiers) peuvent avoir un impact important sur les documents financiers. L’annexe explique la portée de ces évolutions. • Un détail des éléments hors bilan. L’annexe mentionne souvent les contrats financiers auxquels l’entreprise a souscrit, mais qui ne sont pas enregistrés dans le bilan, même s’ils peuvent avoir un impact non négligeable sur la situation financière de l’entreprise. Parmi ces contrats, on peut citer les produits dérivés (les contrats à terme, les options, les swaps), qui sont régulièrement utilisés pour se couvrir contre certains risques.
Test 3.5 Quelles informations potentiellement importantes peut-on trouver dans l’annexe des comptes d’une société ?
Encadré 3.3 Les annexes, cœur du rapport annuel L’instauration des normes IFRS depuis 2005 a conduit à une forte augmentation du nombre de pages des rapports annuels des sociétés. Autrefois, les annexes servaient à expliquer les choix comptables et à donner des suppléments de détails. Par exemple, les amortissements étaient détaillés, ou les dettes financières étaient décomposées par échéance. Aujourd’hui, en sus de ces informations, les annexes contiennent quantité d’informations par activité, ce qui est une très bonne chose. Les analystes disposent désormais d’informations décomposées par secteur d’activité et par zone géographique, avec une précision bien plus grande qu’il y a quelques années. Les calculs de ratios de marge, ou d’indicateurs de rentabilité,
prennent désormais plus de sens puisqu’ils peuvent être faits sur un sous-groupe homogène (par exemple, Bonduelle propose des bilans et comptes de résultat pour la zone Europe, et hors zone Europe, ou encore une dissociation entre les activités Frais et Conserves/Surgelés). D’autre part, les annexes offrent désormais plus d’informations sur les méthodes de calcul et d’estimation des postes du bilan. EDF fournit un détail sur l’amortissement de ses centrales nucléaires ou sur le calcul de ses engagements de retraite, et L’Oréal sur ses méthodes de couvertures de taux, ce qui permet de juger de la qualité de sa politique financière.
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3.3 VALEURS DE MARCHÉ ET VALEURS COMPTABLES Les valeurs légales des actifs et passifs comptabilisés sont appelées valeurs comptables. La valeur comptable d’une action se calcule en prenant celle des capitaux propres au bilan, et en la divisant par le nombre total d’actions. Ainsi, au le tableau 3.1, nous constatons que la valeur comptable des actions de ProdGen est de 313 euros à la fin N. Mais le cours boursier d’une action ProdGen est seulement de 187,20 euros à la fin de l’année N. Cela correspond au prix que les investisseurs sont prêts à payer pour acheter une action ProdGen. Cette valeur de marché de l’action n’apparaît pas au sein du bilan comptable. Pourquoi donc la valeur de marché d’une action n’est-elle pas égale à sa valeur comptable ? Et laquelle des deux valeurs est la plus pertinente pour un décideur financier ? Essayons de répondre à ces deux questions importantes. Il y a deux raisons principales qui expliquent la différence entre valeur de marché et valeur comptable d’une action : • La valeur comptable n’inclut pas tous les actifs et passifs d’une société. • Les actifs et passifs présents dans le bilan d’une société sont, pour la plupart, valorisés à leur coût initial d’acquisition, net des amortissements et provisions passés, et non à leur valeur de marché actuelle. Détaillons ces deux raisons. Premièrement, le bilan comptable ignore souvent certains actifs, qui sont pourtant significatifs en terme de valeur. Par exemple, si une société s’est constitué une bonne réputation en proposant des produits fiables et de qualité, cette réputation n’apparaîtra pas comme un actif dans le bilan. De même, si une société a des salariés très compétents, grâce à des dépenses de recherche-développement dans le passé, ou grâce à des formations régulières du personnel, cela ne pourra pas apparaître sous forme d’actif au bilan. Ces types d’actifs sont appelés actifs immatériels (ou actifs incorporels), et contribuent clairement à la valeur de marché d’une société, et à la prise de décisions au sein de la société. Les comptables enregistrent certains actifs immatériels dans le bilan, mais pas à leur valeur de marché. Par exemple, si une société achète un brevet à une autre entreprise, ce brevet sera comptabilisé comme un actif, à sa valeur d’achat, et sera amorti sur plusieurs années. Le brevet ne sera pas revalorisé comptablement si, par exemple, on découvre de nouvelles applications qui augmentent sa valeur de marché. De même, si une société en rachète une autre à un prix supérieur à sa valeur comptable, les comptables vont comptabiliser un actif immatériel appelé écart d’acquisition (ou survaleur, ou goodwill). La valeur de l’écart d’acquisition correspond à la différence entre la valeur de marché (le prix d’achat) de l’acquisition et sa valeur comptable. Malgré ces quelques exemples de comptabilisation, la plupart des actifs immatériels ne peuvent pas être enregistrés dans le bilan.
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Le bilan ignore aussi certaines dettes qui ont pourtant une importance non négligeable. Par exemple, si l’entreprise a des procès en cours, ceux-ci n’apparaîtront pas au passif du bilan. Ainsi, l’investisseur ne trouvera des informations sur le montant de frais éventuels dus à la perte de procès que dans les annexes, et encore, uniquement si cette information est mentionnée. Maintenant, analysons laquelle des deux, de la valeur de marché ou de la valeur comptable, est la plus pertinente pour la prise de décision. Dans la plupart des cas, les valeurs comptables ne servent à rien. Supposons que IBM ait acheté des machines pour produire des ordinateurs il y a trois ans, pour la somme de 3,9 millions d’euros. Aujourd’hui, ces machines sont valorisées 2,6 millions dans les comptes, compte tenu des trois années d’amortissement. Mais étant donné que les méthodes de production des ordinateurs ont changé, la valeur de marché de ces machines est tombée à 1,2 million. Supposons maintenant que vous envisagiez de remplacer ces machines par un équipement plus moderne. Quelle valeur allez-vous utiliser pour faire des comparaisons ? Si l’on ignore pour l’instant l’aspect fiscal, nous appliquons alors l’un des premiers principes de l’économie, à savoir que la valeur pertinente, c’est celle du coût d’opportunité de l’actif, c’est-à-dire la meilleure valeur que l’on pourrait obtenir de l’actif par ailleurs. Ici, la valeur que l’on pourrait obtenir de l’actif est clairement sa valeur actuelle de revente sur le marché, soit 1,2 million. La valeur comptable n’est aucunement pertinente. Prenons un autre exemple. Vous avez un stock de cuivre qui doit être utilisé pour produire des calorifères. Vous avez payé ce cuivre 29 000 euros au début de l’année, mais sa valeur de marché est aujourd’hui de 60 000 euros. Quel coût retenir pour ce cuivre quand il s’agit de décisions de production ? Encore une fois, le coût initial de 29 000 euros n’a pas de sens, car si ce cuivre disparaît, son coût de remplacement sera alors de 60 000 euros. Aussi, si vous utilisez ce cuivre en production, vous utilisez de fait des ressources qui ont une valeur actuelle de 60 000 euros. Dans certaines situations, la différence de valeur entre les deux mesures peut être faible, ou au contraire très importante. Par exemple, quand on parle de disponibilités au bilan, il n’y a littéralement aucune différence entre leur valeur comptable et leur valeur de marché. Par opposition, pour des immobilisations corporelles, par exemple des machines ou des usines, il y aura souvent une différence énorme entre les deux valeurs. La différence entre la valeur comptable et la valeur de marché d’un actif dépend du type de cet actif. Répétons-le : pour toute prise de décision, la valeur correcte à retenir est la valeur de marché, si elle est disponible.
Test 3.6 Pourquoi la valeur de marché d’une action diffère-t-elle le plus souvent de sa valeur comptable ?
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3.4 MESURE COMPTABLE ET MESURE ÉCONOMIQUE DES REVENUS La distinction que nous avons faite entre valeur de marché et valeur comptable peut s’appliquer aussi aux revenus. Une définition de bon sens consiste à dire que le revenu, c’est le montant que vous pouvez dépenser au cours d’une période, sans toucher au capital que vous aviez initialement en début de période. Par exemple, vous démarrez une période avec 1 000 euros, et finissez avec 1 200 euros. Si vous souhaitez ne pas toucher à votre capital initial (1 000), vous pouvez dépenser uniquement 200 : c’est votre revenu. Cette définition, en plus simplifiée, est celle que l’économiste anglais John R. Hicks a utilisée dans son traité sur ce sujet, traité qui est largement utilisé par les économistes aujourd’hui10. Par opposition, la définition comptable des revenus (ou des produits, ou des recettes) ignore toute augmentation de la valeur de marché des actifs ou passifs, tant que cette augmentation de valeur n’a pas été réalisée effectivement (par la revente). Supposons que vos salaires nets soient de 100 000 euros sur l’année, dépensés pour votre consommation et celle de votre famille, et que dans le même temps, la valeur de vos actifs ait augmenté de 60 000 euros. En règle générale, le comptable va ignorer l’augmentation de valeur tant qu’elle n’a pas été réalisée (c’est-à-dire, tant que les actifs n’auront pas été vendus, matérialisant ainsi la plus-value). Par opposition, l’économiste va compter l’augmentation de valeur des actifs dans le calcul du revenu, car elle affecte vos possibilités de consommation, qui sont de 60 000 euros de plus qu’au début de l’année. Votre revenu total, pour un économiste, sera donc de 160 000 euros. En matière de comptabilité, dans la plupart des pays d’Europe continentale, il y a une différence de traitement entre les gains potentiels (non réalisés) et les pertes potentielles. Les gains potentiels ne sont pas comptabilisés comme des revenus comptables, car ils sont considérés comme incertains. En revanche, les pertes potentielles sont immédiatement comptabilisées par l’écriture d’une provision. L’application de ce principe de prudence conduit donc à un traitement différent. Une autre caractéristique, souvent oubliée, est que la mesure comptable déduit des profits le coût des fonds empruntés (les intérêts des dettes), alors que le coût des capitaux propres n’est pas déduit. Par exemple, si une société a un résultat comptable de 2 millions, mais a utilisé 50 millions de capitaux propres pour financer ses actifs, à un coût des capitaux propres d’à peu près 10 % par an, alors d’un point de vue d’économiste, la société a perdu 3 millions [soit 2 millions – (50 millions × 0,10) = – 3 millions]. Voici donc un cas où le résultat comptable est positif, mais la société ne couvre pas tous ses frais, si l’on inclut son coût des capitaux propres (Cf. Encadré 3.4).
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Encadré 3.4 L’EVA (Economic Value Added) L’EVA (Economic Value Added) est une mesure de performance relativement nouvelle qui a été adoptée par plusieurs sociétés aux États-Unis et en Europe. Conçue par Stern Stewart and Co., cette mesure présente comme avantage principal le fait d’inclure le coût des capitaux propres dans le calcul de l’EVA. Précisément, on calcule l’EVA comme un résultat d’exploitation après impôt, duquel on déduit les coûts des capitaux qui ont été utilisés pour arriver à ce résultat. Le coût des capitaux correspond au taux de rentabilité minimum exigé pour rémunérer les investisseurs dans la société, c’est-a-dire les apporteurs de dettes et de capitaux propres. Le fait d’identifier explicitement le coût des capitaux propres peut permettre une meilleure allocation des capitaux à l’avenir, et permet aussi d’identifier certains mécanismes de « subventions » : par exemple, une activité profitable dont les profits « subventionnent » une autre activité déficitaire. Cette méthode peut permettre aux diri-
geants de voir où il y a création de valeur, et ainsi, leur permettre de mieux gérer. L’EVA, et une autre mesure dérivée, la MVA (Market Value Added), permettent de décider des acquisitions, des désinvestissements et des lancements de nouveaux produits, et de prendre encore d’autres décisions stratégiques. De nombreuses sociétés, comme Accor, Quaker Oats, Microsoft et Coca-Cola, utilisent l’EVA pour mesurer la performance de leur gestion. Par exemple, Accor est très sensible à la gestion de son parc hôtelier. Cette compagnie s’est rendue compte que le capital qui finançait ces actifs avait un coût, et qu’il fallait en tenir compte pour prendre des décisions efficientes. En incluant ces coûts au sein d’un raisonnement par l’EVA, Accor publie un rapport annuel qui décompose la création de valeur suivant ses différentes lignes d’hôtels, ce qui lui a probablement permis d’affiner la gestion de son capital immobilier.
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3.5 RENTABILITÉ BOURSIÈRE ET RENTABILITÉ FINANCIÈRE (OU COMPTABLE) Quand les actionnaires d’une société demandent quelle a été la performance de la société sur une période donnée (un trimestre, un an, plusieurs années), ils demandent réellement de combien la société a fait progresser leur richesse personnelle sur la période. Une façon directe de calculer cela consiste à calculer le taux de rentabilité d’un investissement dans les actions de la société sur la période. Nous avons vu dans le Chapitre 2 que le taux de rentabilité d’un investissement en actions est : r=
Cours final de l’action – Cours initial de l’action + Dividende versé Cours initial de l’action
On appelle cet indicateur rentabilité boursière (ou rentabilité de l’action). Reprenons l’exemple de ProdGen. En nous référant aux données boursières, nous savons que le cours boursier de l’action au début N était de 200 euros, et à la fin de l’année, après paiement des dividendes, le cours était de 187,20 euros. Les dividendes ont été de 10 euros par action pour cette année. Le taux de rentabilité d’un investissement dans l’action ProdGen sur l’année N est donc de : Rentabilité de l' action =
187, 20 – 200 + 10 = −0, 014 ou – 1, 4 % 200
Cependant, la performance financière des sociétés est aussi mesurée en calculant un ratio appelé rentabilité financière. La rentabilité financière se calcule comme le rapport entre le résultat net (la dernière ligne du compte de résultat de la société) et la valeur comptable des capitaux propres (la première ligne du passif au bilan). On parle aussi de ROE, pour Return on equity (rentabilité des capitaux propres). La rentabilité financière de ProdGen est de11 : Rentabilité financière =
Résultat net 23, 4 = = 0, 078 ou 7, 8 % Capitaux propres 300
Ainsi, nous constatons qu’il n’y a pas forcément de correspondance entre la rentabilité financière (c’est-à-dire comptable) d’une société et la rentabilité boursière que les investisseurs ont obtenue de l’action. Test 3.7 En N, la société Givre a dégagé un bénéfice par action de 5 euros et a payé aux actionnaires un dividende de 3 euros par action. La valeur comptable de l’action en début d’année était de 30 euros et son cours boursier était de 40 euros. À la fin de l’année, la valeur comptable de l’action est de 32 euros et le cours boursier est de 35 euros. Comparez la rentabilité financière (ROE) et la rentabilité boursière de la société Givre.
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TABLEAU 3.5 Typologie des ratios Ratio
Formule
Valeur
Profitabilité Marge d’exploitation
Résultat d’exploitation Chiffre d’affaires
60 = 30 % 200
Rentabilité de l’actif (rentabilité économique)
Résultat d’exploitation Total de l’actif moyen
60 = 9, 1 % ⎛ 600 + 720 ⎞ ⎜ ⎟ ⎝ ⎠ 2
Résultat net Capitaux propres
23, 4 = 7, 6 % ⎛ 300 + 313, 4 ⎞ ⎜ ⎟ ⎝ ⎠ 2
Rentabilité financière (ROE)
Rotation des actifs Rotation des créances clients (délai moyen de paiement des clients) Rotation des stocks (délai moyen d’écoulement des stocks)
Créances clients moyennes × 365 Chiffre d’affaires
(50 + 60) × 365 2
200
Stocks moyens × 365 Achats
(150 + 180) × 365 2
110
Rotation de l’actif
Endettement
Chiffre d’affaires Total de l’actif moyen
Endettement
Dette financière totale Actif total
Poids des intérêts
Intérêts financiers Résultat d’exploitation
= 100, 4 jours
= 547 , 5 jours
2 = 9, 1 % ⎛ 600 + 720 ⎞ ⎜ ⎟ ⎝ ⎠ 2
406, 6 = 57 % 720 21 = 35 % 60
Liquidité Liquidité générale Liquidité immédiate (ou réduite)
Actifs circulants Passifs circulants
360 = 1, 4 256, 6
Disponibilités + VMP Passifs circulants
180 = 0, 7 256, 6
Cours d’une action Bénéfice par action
187, 20 = 8, 0 23, 4
Cours d’une action Valeur comptable d’une action
187, 20 = 0, 6 313, 4
Valeur de marché PER (Price earning ratio ou ratio cours/bénéfice ou ratio de capitalisation des bénéfices) Market to book (ou ratio valeur boursière/valeur comptable)
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3.6 L’ANALYSE PAR LES RATIOS Malgré les différences mentionnées entre la finance et la comptabilité, tant dans les principes qu’en pratique, les documents financiers d’une société peuvent donner des indices très appréciables sur sa santé financière, et l’analyse du passé peut aider à prévoir les évolutions futures. Pour analyser la performance d’une entreprise à partir de ses documents financiers, il est utile de calculer une batterie de ratios, un ratio permettant de comparer facilement les années entre elles ou d’évaluer différentes entreprises. Les ratios permettent d’évaluer la performance des entreprises sous cinq aspects différents : la profitabilité, la rotation des actifs, l’endettement, la liquidité et la valeur de marché. Le tableau 3.5 présente ces ratios et les calcule pour la société ProdGen. Premièrement, nous pouvons analyser les ratios de profitabilité. La profitabilité peut être mesurée en rapportant un résultat d’exploitation aux ventes (on parlera de marge d’exploitation), ou en rapportant un résultat aux actifs utilisés (rentabilité des actifs, ou rentabilité économique), enfin, en rapportant un résultat aux capitaux propres (rentabilité financière, ou ROE). Le résultat à retenir dépend du ratio : pour les ratios de marge d’exploitation et de rentabilité des actifs, on prendra le résultat d’exploitation comme indicateur de résultat ; pour la rentabilité financière, on prendra le résultat net. D’autre part, ces ratios mélangent deux types d’indicateurs : des indicateurs du compte de résultat, qui représentent des résultats sur une période donnée, et des indicateurs du bilan, qui sont une « photo » à une date fixée. La pratique consiste, pour les indicateurs de bilan, à prendre la moyenne de l’indicateur entre le début de l’année (« photo » initiale) et la fin de l’année (« photo » finale). Deuxièmement, détaillons les ratios de rotation des actifs, qui mesurent la capacité de l’entreprise à utiliser efficacement ses actifs pour générer du profit. Nous avons d’abord la rotation de l’actif, qui est un ratio global. Par opposition, la rotation des créances clients, la rotation des stocks, sont des ratios spécifiques à certains éléments de l’actif. Ces ratios mesurent la valeur de l’actif en nombre de jours de vente (pour les créances clients) ou en nombre de jours de coûts de production (pour les stocks) : par extension, ils mesurent donc le délai moyen pendant lequel ces actifs restent dans l’entreprise. Troisièmement, les ratios d’endettement montrent la structure du passif des entreprises, et le poids des intérêts financiers dans les résultats. Le ratio d’endettement financier mesure la structure du passif, et le ratio de poids des intérêts évalue le pourcentage du résultat d’exploitation qui est ponctionné par les frais financiers (les intérêts). Quatrièmement, les ratios de liquidité mesurent la capacité de l’entreprise à payer ses dettes d’exploitation, c’est-à-dire à payer ses fournisseurs, son personnel, à la fin de chaque mois, tout en restant solvable. Les principaux ratios de liquidité sont la liquidité générale, et le ratio plus strict de liquidité immédiate, qui ne prend en compte que les actifs les plus rapidement liquides : les disponibilités et les valeurs mobilières de placement. Cinquièmement, les ratios de valeur de marché montrent la relation entre les indicateurs comptables et la valorisation de la société par le marché boursier. Les deux ratios les plus souvent utilisés sont le PER (Price earning ratio, ou ratio cours/bénéfice, ou ratio de capitalisation des bénéfices) et le Market to book12. © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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L’analyse des ratios d’une société doit être faite en tenant compte de deux choses : • Quel point de vue adopter ? Celui des actionnaires, des banquiers, des employés, ou d’un autre partenaire ? • Quel point de comparaison doit être utilisé ? Les points de comparaison (points de référence, ou benchmarks) peuvent être de trois types : • Les ratios financiers d’autres sociétés pour la même période. • Les ratios de la société analysée, quelques années auparavant. • Des informations issues des marchés financiers, par exemple les valeurs de certains actifs, ou le niveau des taux d’intérêts. Plusieurs organismes fournissent des ratios secteur par secteur (ratios sectoriels), par exemple (1) des sociétés d’informations financières, comme OR Télématique, SCRL, Dun & Bradstreet, Reuters, Thomson Financial Services, etc. ; (2) des organismes d’État, comme l’INSEE ; (3) des syndicats professionnels, comme le Syndicat national de l’industrie pharmaceutique (SNIP), etc. Ces ratios et informations financières sont le plus souvent disponibles sous forme de CD-Roms, et d’information en ligne (Minitel, Internet). Test 3.8
Quels sont les cinq types de ratios utilisés dans une analyse financière ?
3.6.1 Les relations entre ratios On peut décomposer la rentabilité économique en un produit de deux ratios, comme indiqué : Rentabilité économique =
résultat d’exploitation chiffre d’affaires × chiffre d’affaires total de l’actif
= marge d’exploitation × rotation de l’actif La décomposition de la rentabilité économique en marge d’exploitation et rotation de l’actif permet d’illustrer le fait que des sociétés dans des secteurs très différents peuvent avoir des marges et des taux de rotation de l’actif qui n’ont rien de commun, et pourtant, aboutir à la même rentabilité économique. Par exemple, un hypermarché réalise une faible marge par produit vendu, mais fait « tourner » rapidement ses actifs (essentiellement les stocks de produits), c’est-à-dire qu’il a une rotation élevée des actifs. Par opposition, un magasin qui vend des bijoux de luxe aura une marge élevée, mais une faible rotation de ses actifs. Les deux sociétés peuvent néanmoins dégager la même rentabilité économique. Prenons un exemple : deux entreprises qui ont une rentabilité économique de 10 % par an. La première société est une entreprise de grande distribution, la seconde est une entreprise de travaux publics. Le tableau 3.6 montre que la société d’hypermarchés a une « faible » marge, et réussit à obtenir sa rentabilité économique en « faisant tourner » ses actifs cinq fois par an. Par comparaison, l’entreprise de travaux publics, qui a beaucoup de machines et de stocks, a une rotation d’actif © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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« faible », puisque les actifs « tournent » 0,5 fois par an, mais la rentabilité économique est obtenue par le fait que la société réalise une marge importante (20 % de marge par rapport aux ventes). En clair, la société de grande distribution gagne peu de marge pour chaque produit vendu, mais elle vend beaucoup de produits, ce qui lui assure sa rentabilité. La société de travaux publics vend peu par rapport à ses investissements, mais chaque produit rapporte une marge élevée : la rentabilité économique est aussi de 10 % par an. TABLEAU 3.6 Des marges et rotations différentes suivant les secteurs Marge d’exploitation × Rotation de l’actif =
Rentabilité économique
Chaîne d’hypermarchés
0,02
5,0
0,10
Société de travaux publics
0,20
0,5
0,10
L’argument important est qu’une marge ou une rotation « faible » n’est pas nécessairement le signe d’une société en difficulté. Chacun de ces ratios doit être interprété en fonction des ratios moyens dans son secteur. Par exemple, un concessionnaire de Ferrari aura probablement une marge plus élevée et une rotation plus faible qu’un concessionnaire Peugeot, même si les deux ont peut-être le même niveau de rentabilité économique.
Test 3.9 Si la société A a une rentabilité économique plus élevée que la société B, mais la même rotation d’actif, à quel niveau est sa marge d’exploitation ?
3.6.2 L’effet de levier financier L’effet de levier financier signifie simplement l’impact de l’endettement sur la rentabilité financière. Les actionnaires d’une entreprise utilisent l’endettement pour augmenter leur rentabilité financière, mais dans le même temps, ils contribuent à augmenter la sensibilité de la rentabilité financière aux variations de la rentabilité économique. En d’autres termes, en utilisant l’effet de levier financier, les actionnaires d’une entreprise se soumettent à un risque financier, en plus du risque économique qu’ils supportaient déjà13. Une augmentation de l’endettement d’une société va augmenter sa rentabilité financière si et seulement si sa rentabilité économique est supérieure au taux d’intérêt sur l’endettement. Cela paraît logique, de façon intuitive : si la rentabilité économique est supérieure au taux d’intérêt des dettes, alors l’argent emprunté rapporte plus qu’il ne coûte (car l’argent emprunté est investi dans l’actif et rapporte la rentabilité économique). Le gain reste alors à la disposition des actionnaires, et augmente donc la rentabilité financière. Si, par opposition, la rentabilité économique est inférieure au coût de la dette, les actionnaires feraient mieux de ne pas endetter la société. Prenons l’exemple de la société Cadette, qui utilise l’effet de levier financier, tandis que Kappa ne l’utilise pas. Comparons leurs rentabilités financières suivant que les taux d’intérêts : (1) sont à 10 % par an ; (2) sont à 15 % par an. Les calculs sont donnés dans le tableau 3.7. © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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Un levier financier élevé augmente la variabilité de la rentabilité financière, et accroît le risque de faillite. Le tableau 3.8 montre l’évolution de la rentabilité économique et de la rentabilité financière selon trois scénarios, qui représentent des conditions économiques différentes. Nous supposons dans ce tableau que le taux d’intérêt sur les dettes de Cadette est de 10 % par an. La relation exacte entre rentabilité financière, rentabilité économique et levier peut être résumée dans l’équation suivante : D ] CP × (1 – Taux d' imposition)
Rentabilité financière = [REco + (REco − Taux d' intérêt) ×
où REco représente la rentabilité économique, D les dettes, et CP les capitaux propres. Cette équation signifie que si une entreprise a une rentabilité économique supérieure à son taux d’intérêt sur les dettes, alors la rentabilité financière sera supérieure à (1 – Taux d’imposition) × la rentabilité économique, d’un montant qui sera d’autant plus élevé que le ratio dettes/capitaux propres sera grand. TABLEAU 3.7 Effet du niveau de taux d’intérêt sur la rentabilité financière Kappa
Cadette
1 000 000 1 000 000 0 120 000
1 000 000 500 000 500 000 120 000
12 %
12 %
Hypothèse (1) : taux d’intérêt de 10 % par an Résultat d’exploitation Frais financiers Résultat courant avant impôt Impôt (à 40 %) Résultat net Capitaux propres Rentabilité financière
120 000 0 120 000 48 000 72 000 1 000 000 7,2 %
120 000 0 70 000 28 000 42 000 500 000 8,4 %
Hypothèse (2) : taux d’intérêt de 15 % par an Résultat d’exploitation Frais financiers Résultat courant avant impôt Impôt (à 40 %) Résultat net Capitaux propres Rentabilité financière
120 000 0 120 000 48 000 72 000 1 000 000 7,2 %
120 000 75 000 45 000 18 000 27 000 500 000 5,4 %
Actif total Capitaux propres Dettes Résultat d’exploitation Rentabilité économique (Résultat d’exploitation/Actif)
Sauf indication contraire, tous les montants sont en euros.
Du point de vue d’un banquier, l’augmentation de l’endettement d’une société constitue généralement un signal négatif. Les agences de notation (rating) comme © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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Moody’s ou Standard and Poors, vont souvent revoir leur notation à la baisse pour les sociétés qui ont un ratio d’endettement qui augmente. Mais du point de vue de l’actionnaire, l’augmentation de l’endettement peut être bénéfique.
Test 3.10 Si, dans une société, la rentabilité économique est égale au taux d’intérêt sur les dettes, quel sera l’impact d’une augmentation de l’endettement sur la rentabilité financière ?
TABLEAU 3.8 Impact de l’environnement économique sur la rentabilité financière Rentabilité financière Conditions économiques Mauvaise année Année normale Bonne année
Rentabilité économique
Kappa
Cadette
1% 12 % 30 %
0,6 % 7,2 % 18,0 %
– 4,8 % 8,4 % 30,0 %
3.6.3 Les limites de l’analyse par les ratios L’utilisateur de ratios financiers doit être conscient de leurs limitations. Le problème majeur est qu’il n’existe absolument aucune norme à laquelle comparer les ratios pour juger s’ils sont trop élevés ou trop bas. De plus, les ratios sont obtenus à partir d’indicateurs comptables dont les modes de calcul sont souvent discutables. Enfin, il est difficile de trouver des entreprises de référence, car les entreprises diffèrent entre elles, même si elles sont dans le même secteur. Les entreprises peuvent avoir par exemple des degrés de diversification différents, ou un âge, une taille, différents, de même pour leur niveau d’internationalisation, ou le type de méthode comptable qu’elles utilisent (la manière de valoriser les stocks, d’amortir ou de provisionner les actifs, peuvent être différentes par exemple). En conclusion, l’analyse par les ratios donne grossièrement les tendances, mais ne doit pas être utilisée pour la prise de décisions précises.
3.7 LA PLANIFICATION FINANCIÈRE La planification financière est un processus en perpétuel mouvement : prévoir des plans de financement, les mettre en œuvre, puis les modifier en fonction des résultats dégagés. Pour démarrer un plan de financement (on parlera aussi de business plan), il faut partir du plan stratégique de l’entreprise. La stratégie fixe les objectifs de développement général de l’entreprise et les prévisions de croissance (dans quelle activité l’entreprise veut-elle se développer ? De quel secteur veut-elle se retirer ? Avec quelle rapidité ?) : en cela, elle aide à la planification financière. Prenons l’exemple d’ITT, qui décida en 1995 de quitter son activité dans les assurances et de se concentrer sur les jeux et les centres de loisirs. Cette décision stratégique signifiait que les plans de financement de cette année devraient prévoir © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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un redéploiement des actifs de la société : pendant plusieurs années, les ventes n’augmenteraient plus, il y aurait même une réduction des activités (downsizing)14. L’horizon de planification est un autre élément important de la planification financière. Généralement, plus l’horizon est éloigné, moins le plan de financement sera détaillé. Par exemple, un plan de financement sur cinq ans consistera en un ensemble de comptes de résultats et bilans prévisionnels, avec juste les grands postes et peu de détails. Par opposition, le plan de financement du mois prochain va détailler les prévisionnels de recettes et de dépenses par lignes de produits, et va fournir une projection détaillée des entrées et sorties d’argent. Les plans de financement sur plusieurs années sont généralement révisés une fois par an, et les plans annuels sont révisés au moins à chaque trimestre15. La démarche de la planification financière peut être décomposée en plusieurs étapes : 1. Les dirigeants essaient de prévoir les facteurs extérieurs qui vont influencer la demande de produits de l’entreprise et ses coûts de production. Ces facteurs sont par exemple le niveau d’activité économique des marchés sur lesquels l’entreprise vend ses produits, l’inflation, les cours de change entre devises, les taux d’intérêts, la production et les prix de vente des concurrents de l’entreprise, etc. 2. En fonction de ces facteurs externes, et des décisions internes (les investissements à réaliser, les niveaux de production à atteindre, les dépenses à faire en publicité, en recherche, les dividendes à verser aux actionnaires), les dirigeants calculent alors les revenus prévisionnels, les dépenses à prévoir, les flux de trésorerie qui vont entrer et sortir de l’entreprise, et finalement, prévoient si la société va devoir recourir à des financements externes pour financer ces développements. Ils vérifient que les résultats prévisionnels permettent de créer de la valeur pour les actionnaires, et que les moyens de financement sont effectivement disponibles. S’il se présente un problème dans la prévision, les dirigeants révisent leurs hypothèses jusqu’à arriver à un prévisionnel faisable. Ce plan de financement prévisionnel devient alors la référence pour prendre des décisions durant l’année. Il est aussi recommandé de prévoir quelques solutions de rechange, au cas où certaines prévisions ne pourraient pas être réalisées. 3. En se fondant sur le plan de financement, les directeurs de divisions établissent des objectifs de performance pour eux-mêmes et leurs subordonnés. 4. La performance réalisée est régulièrement comparée aux objectifs fixés dans le plan (par exemple chaque mois ou chaque trimestre), et des actions correctives sont mises en place si nécessaire. Les dirigeants peuvent aussi revoir les objectifs du plan, s’ils constatent des écarts importants par rapport aux prévisions. 5. À la fin de chaque année, des récompenses sont distribuées (des primes, des augmentations) et le cycle de planification recommence.
3.8 COMMENT BÂTIR UN PLAN DE FINANCEMENT Les plans de financement sont généralement des feuilles de tableur fondées pour la plupart sur les documents financiers de la société. Par exemple, nous allons bâtir le plan de financement à un an de la société ProdGen, cette société hypothétique dont © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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nous avons déjà analysé les comptes dans ce chapitre. ProdGen a été fondée il y a 10 ans, et produit et vend des produits génériques pour les consommateurs. Le tableau 3.9 détaille les comptes de résultat et bilans de ProdGen pour les 3 dernières années. Supposons que ces documents financiers soient la seule information dont nous disposions sur cette société. Comment bâtir un plan de financement pour la prochaine année ? L’approche la plus simple consiste à prévoir le niveau des ventes pour l’an prochain, et supposer que la plupart des postes du compte de résultat et du bilan vont représenter la même proportion des ventes que l’année précédente. On appelle cette méthode la méthode du pourcentage des ventes. Illustrons notre propos avec ProdGen. TABLEAU 3.9 Documents financiers de ProdGen, de N – 3 à N Compte de résultat
N–2
N–1
N
Ventes
200,00
240,00
288,00
Achats et charges externes
110,00
132,00
158,40
Valeur ajoutée
90,00
108,00
129,60
Salaires et frais de gestion
30,00
36,00
43,20
Résultat d’exploitation
60,00
72,00
86,40
Frais financiers
30,00
45,21
64,04
Impôt sur les sociétés
12,00
10,72
8,94
Résultat net
18,00
16,07
13,41
Dividendes
5,40
4,82
4,02
12,60
11,25
9,39
N–3
N–2
N–1
N 864,00
Variation des capitaux propres Bilan Immobilisations nettes
500,00
600,00
720,00
Stocks
50,00
60,00
72,00
86,40
Créances clients
40,00
48,00
57,60
69,12
Disponibilités Total actif
10,00
12,00
14,40
17,28
600,00
720,00
864,00
1 036,80
Capitaux propres
300,00
312,60
323,85
333,24
Dettes à long ou moyen terme
150,00
150,00
150,00
150,00
Dettes d’exploitation
30,00
36,00
43,20
51,84
Dettes à court terme
120,00
221,40
346,95
501,72
Total passif
600,00
720,00
864,00
1 036,80
En millions d’euros.
La première étape consiste à analyser les comptes de résultat et bilans passés, pour déterminer quels postes sont relativement stables, en proportion des ventes. Ceci nous permettra de déterminer les postes qui peuvent être déduits de notre prévision de ventes, et les postes pour lesquels il faudra recourir à un autre type de © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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prévision. Dans le cas de ProdGen, on constate clairement que les coûts de production, le résultat d’exploitation et les actifs représentent une proportion stable des ventes. En revanche, les frais financiers, l’impôt, le résultat net, et la plupart des postes du passif (à l’exception des dettes d’exploitation) ne sont pas fortement corrélés aux ventes. Le tableau 3.10 résume ces éléments. La deuxième étape consiste à essayer de prévoir les ventes futures. Comme il y a beaucoup de postes qui sont corrélés aux ventes, la prévision des ventes doit être très précise. Il faudra aussi tester la sensibilité du plan de financement à toute variation des ventes. Pour ProdGen, nous allons supposer que les ventes vont continuer à progresser de 20 % l’année prochaine, ce qui nous amène à un prévisionnel de ventes de 345,6 millions d’euros. La troisième étape consiste à calculer le prévisionnel des postes qui sont corrélés aux ventes. Ainsi, comme le coût des achats et charges externes représentait régulièrement 55 % des ventes par le passé, le prévisionnel de ce poste pour N + 1 sera de 0,55 × 345,6, c’est-à-dire 190,08 millions. De même, comme le total de l’actif était régulièrement 3,6 fois le chiffre d’affaires annuel, notre prévisionnel d’actif total en N + 4 sera de 1 244,16 millions. TABLEAU 3.10 Documents financiers de ProdGen exprimés en pourcentage des ventes, N – 3 à N Compte de résultat
N–2
N–1
N
Ventes Achats et charges externes Valeur ajoutée Salaires et frais de gestion Résultat d’exploitation Frais financiers Impôt sur les sociétés Résultat net Dividendes Variation des capitaux propres
100,0 55,0 45,0 15,0 30,0 15,0 6,0 9,0 2,7 6,3
100,0 55,0 45,0 15,0 30,0 18,8 4,5 6,7 2,0 4,7
100,0 55,0 45,0 15,0 30,0 22,2 3,1 4,7 1,4 3,3
Bilan
N–2
N–1
N
Immobilisations nettes Stocks Créances clients Disponibilités Total actif Capitaux propres Dettes à long ou moyen terme Dettes d’exploitation Dettes à court terme Total passif
300,0 30,0 24,0 6,0 360,0 156,3 75,0 18,0 110,7 360,0
300,0 30,0 24,0 6,0 360,0 134,9 62,5 18,0 144,6 360,0
300,0 30,0 24,0 6,0 360,0 115,7 52,1 18,0 174,2 360,0
La dernière étape consiste à remplir les lignes qui manquent encore dans le compte de résultat et le bilan (c’est-à-dire les postes qui ne correspondent pas à une proportion fixe des ventes). Supposons que le taux d’intérêt sur les dettes à long ou © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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moyen terme soit de 8 % par an, et sur les dettes à court terme, de 15 % par an. Alors notre prévision de frais financiers correspondra à 8 % fois le montant de la dette à long ou moyen terme plus 15 % fois le montant de la dette à court terme, les montants des deux dettes étant pris au début N + 1, c’est-à-dire à la fin N. On obtient alors des frais financiers prévisionnels de 87,26 millions. L’impôt sur les sociétés est estimé à 40 % du résultat après frais financiers, soit 6,57 millions. Le résultat net sera donc de 9,85 millions d’euros. Le compte de résultat prévisionnel pour N + 1 est présenté dans la dernière colonne du tableau 3.11. Penchons-nous maintenant sur le bilan prévisionnel à fin N + 1. ProdGen prévoit de verser un dividende représentant 30 % du résultat, les capitaux propres vont alors augmenter de 6,9 millions d’euros (de 333,24 à 340,14). L’actif va augmenter de 207,36 millions, et les dettes d’exploitation de 10,37. Nous devons maintenant calculer le besoin de financement éventuel de ProdGen, pour savoir s’il va être nécessaire de faire une augmentation de capital ou d’emprunter de l’argent auprès des banques. Pour cela, nous prenons le montant de la croissance de l’actif (besoin d’argent) auquel nous soustrayons la croissance de capitaux propres et la croissance des dettes d’exploitation (ressources d’argent)16. On a : Besoin de financement additionnel = Augmentation de l’actif – augmentation due au résultat après dividende – augmentation des dettes d’exploitation = 207,36 – 6,9 – 10,37 = 190,09 Ainsi, ProdGen aura besoin de 190,09 millions d’euros supplémentaires, qui doivent être obtenus des partenaires (actionnaires ou banquiers). Dans le bilan du tableau 3.11, nous avons supposé que ce besoin de financement serait comblé par une augmentation de la dette financière à court terme, qui passe donc ici de 501,72 à 691,81 millions d’euros17. Test 3.11 Si les ventes prévisionnelles pour N + 1 étaient de 360 au lieu de 345,60 millions, quel serait le besoin de financement prévisionnel de ProdGen ?
TABLEAU 3.11 Compte de résultat et bilan prévisionnels de ProdGen pour l’année N + 1 Compte de résultat Ventes Achats et charges externes Valeur ajoutée Salaires et frais de gestion Résultat d’exploitation Frais financiers Impôt sur les sociétés Résultat net Dividendes Variation des capitaux propres
N–2
N–1
N
N + 1(p)
200,00 110,00 90,00 30,00 60,00 30,00 12,00 18,00 5,40 12,60
240,00 132,00 108,00 36,00 72,00 45,21 10,72 16,07 4,82 11,25
288,00 158,40 129,60 43,20 86,40 64,04 8,94 13,41 4,02 9,39
345,60 190,08 155,52 51,84 103,68 84,26 6,57 9,85 2,96 6,90
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N–3
N–2
N–1
N
N + 1 (p)
500,00
600,00
720,00
864,00
1 036,80
Stocks
50,00
60,00
72,00
86,40
103,68
Créances clients
40,00
48,00
57,60
69,12
82,94
Immobilisations nettes
Disponibilités
10,00
12,00
14,40
17,28
20,74
Total actif
600,00
720,00
864,00
1 036,80
1 244,16
Capitaux propres
300,00
312,60
323,85
333,24
340,14
Dettes à long ou moyen terme
150,00
150,00
150,00
150,00
150,00
30,00
36,00
43,20
51,84
62,21
Dettes d’exploitation Dettes à court terme
120,00
221,40
346,95
501,72
691,81
Total passif
600,00
720,00
864,00
1 036,80
1 244,16
En millions d’euros.
3.9 LA CROISSANCE ET LES BESOINS DE FINANCEMENT EXTERNES Nous savons désormais que si les ventes de ProdGen augmentent de 20 % en N + 1, la société devra obtenir un financement supplémentaire de 190,09 millions auprès de ses partenaires. Les dirigeants peuvent décider de recourir à une dette financière à court terme (c’est l’hypothèse que nous avons retenue dans le tableau 3.11), ou bien à une dette à long terme, ou enfin, de faire une augmentation de capital. Analysons maintenant dans quelle mesure ce besoin de financement est sensible à la hausse prévisionnelle des ventes. Une manière de procéder à cette analyse de sensibilité consiste à répéter la démarche que nous avons utilisée dans la précédente section, en utilisant plusieurs taux de croissance des ventes différents. On peut créer pour cela une feuille de tableur, à l’instar de celle qui est présente sur notre site Internet18. Le résultat est présenté dans la figure 3.1.
3.9.1 Le potentiel de croissance pour une société La figure 3.1 nous montre le montant de financement externe qu’une société devra obtenir si elle souhaite atteindre un certain objectif de ventes. Mais nous pouvons inverser la question : au maximum, quel niveau de ventes une entreprise peut-elle atteindre si le montant de son financement externe est limité ? Pour répondre à cette question, nous supposons que la contrainte de financement est de la forme suivante : • La société ne va pas émettre de nouvelles actions, et donc les capitaux propres ne croîtront que grâce à la rétention des bénéfices dans la société. • La société ne va pas augmenter son ratio Dettes/capitaux propres : cela signifie que la dette augmentera au maximum au même rythme que la croissance des capitaux propres (cette croissance étant due aux résultats incorporés en réserves).
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PARTIE I La finance et le système financier
Figure 3.1 Montant du financement externe nécessaire en fonction de la croissance prévisionnelle des ventes 400 350 Financement externe nécessaire
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300 250 200 150 100 50 0 – 50 0%
5%
10 %
15 %
20 %
25 %
30 %
Taux de croissance des ventes
Croissance des ventes Financement externe
0,0 %
5,0 %
10,0 %
15,0 %
20,0 %
25,0 %
30,0 %
– 9,90
56,42
122,74
189,05
255,37
321,68
388,00
Sous ces conditions, la société ne pourra pas croître plus vite que le taux de croissance des capitaux propres, que l’on appellera alors le potentiel de croissance de la société. La formule de ce potentiel de croissance est : Potentiel de croissance = taux de rétention des résultats × rentabilité financière
3.9.2 Une variante de la formule du potentiel de croissance Potentiel de croissance = taux de croissance des capitaux propres Sans augmentation de capital (par émission de nouvelles actions), le taux de croissance des capitaux propres correspond juste au résultat incorporé en réserves, divisé par la valeur des capitaux propres en début d’année : Taux de croissance des capitaux propres = résultat incorporé en réserves/capitaux propres en début d’année Or on a : Résultat incorporé en réserves = taux de rétention du résultat × résultat de l’année Le taux de rétention du résultat est la proportion du résultat qui n’a pas été versée en dividendes (ou utilisée pour racheter des actions). Par définition, il est égal à : © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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Taux de rétention du résultat = 1 – taux de distribution du dividende19 – taux de rachat d’actions Aussi, en substituant dans l’équation initiale : Taux de croissance des capitaux propres = taux de rétention du résultat × résultat net/capitaux propres en début d’année Soit, en reformulant : Taux de croissance des capitaux propres = taux de rétention du résultat × rentabilité financière En conséquence, nous avons trouvé une variante de la formule du potentiel de croissance : Potentiel de croissance = taux de rétention du résultat × rentabilité financière
3.9.3 Implications de la formule du potentiel de croissance Le potentiel de croissance maximal d’une firme est égal à sa rentabilité financière, et ce maximum est atteint quand le taux de distribution (Pay Out) est de zéro, c’est-àdire quand tout le résultat net est conservé, intégré dans les réserves et réinvesti dans la société. Si une société essaie de se développer à un taux de croissance supérieur à ce potentiel de croissance, alors elle devra émettre de nouvelles actions, ou augmenter son ratio d’endettement.
3.9.4 Un exemple de potentiel de croissance La société des Industries Rapides (RapInd) présente les ratios suivants : Rotation de l’actif = 0,5 fois par an Ratio dettes/capitaux propres = 1,0 Taux de distribution des dividendes (Pay Out) = 40 % Rentabilité financière = 20 % par an Les ventes de l’an dernier ont été de 1 million d’euros. On en déduit que les actifs sont de 2 millions, et que les dettes et les capitaux propres sont chacun de 1 million d’euros. La rentabilité financière étant de 20 %, le résultat net est donc de 200 000 euros, dont 80 000 (soit 40 %) ont été versés en dividendes, et 120 000 incorporés en réserves. Aussi, en maintenant le ratio Dettes/capitaux propres à 1, RapInd pourrait s’endetter de 120 000 euros supplémentaires, ce qui, combiné aux 120 000 inclus dans les capitaux propres, pourrait augmenter ses actifs de 240 000 et ses ventes de 120 000 euros, au maximum. Le potentiel de croissance des ventes est donc : g=
120 000 = 0, 12 ou 12% 1 million
On obtient le même résultat en appliquant la formule :
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PARTIE I La finance et le système financier
g = rentabilité financière × (1 – taux de distribution du résultat) = 20 % × (1 – 0,40) = 12 % Les documents financiers de RapInd sur trois années de croissance sont présentés dans le tableau 3.12. Test 3.12 Si une société croît à un taux inférieur à son potentiel de croissance, quelles sont les implications sur son financement ?
TABLEAU 3.12 Documents financiers de RapInd pour les années N à N + 3 Comptes de résultat
N+1
N+2
N+3
1 000 000 € 200 000 € 80 000 € 120 000 €
1 120 000 € 224 000 € 89 600 € 134 400 €
1 254 400 € 250 880 € 100 352 € 150 528 €
N
N+1
N+2
N+3
2 000 000 € 1 000 000 € 1 000 000 €
2 240 000 € 1 120 000 € 1 120 000 €
2 508 800 € 1 254 400 € 1 254 400 €
2 809 856 € 1 404 928 € 1 404 928 €
Ventes Résultat net Dividendes Augmentation des capitaux propres Bilans Actif Capitaux propres Dettes
3.10 LA GESTION DU BFR (BESOIN EN FONDS DE ROULEMENT) Dans la plupart des activités, on doit engager des dépenses d’exploitation avant de toucher l’argent des ventes. En conséquence, les sociétés ont en général plus d’argent investi dans les stocks et les créances clients qu’elles n’ont d’argent redevable dans les dettes d’exploitation. Cette différence entre les actifs d’exploitation dans lesquels on a investi (stocks et créances clients) et les passifs d’exploitation que l’on n’a pas encore réglés (dettes d’exploitation) s’appelle le BFR (Besoin en fonds de roulement). Si une société a besoin d’argent de façon permanente pour investir dans son BFR, elle recourra alors à un financement long terme. En revanche, des besoins de financement saisonniers pourront être couverts par des dettes financières à court terme, par exemple des autorisations de découvert. Le maître mot dans la gestion du BFR est de minimiser l’investissement en stocks et créances clients, qui représentent des montants qui ne rapportent pas d’argent immédiat, et de maximiser le recours au « crédit gratuit » que représentent les acomptes versés par les clients, les salaires non encore payés, les dettes fournisseurs et autre dettes d’exploitation. Ces trois sources de fonds (stocks, créances clients, dettes d’exploitation) sont gratuites pour la société, au sens où elles ne supportent pas un intérêt financier20. Il existe des méthodes pour réduire le délai entre le moment où une société vend ses produits, et le moment où elle collecte le montant de la vente de la part de ses © 2011 Pearson Education France – Finance, 3e éd. – Zvi Bodie, Robert Merton
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clients : ces méthodes contribuent à réduire le BFR. Idéalement, la société souhaiterait que ses clients paient par avance. De la même manière, la société peut réduire son BFR en allongeant le délai entre le moment où elle achète ses fournitures et le moment où elle règle effectivement ses fournisseurs. Pour mieux appréhender la relation entre ces délais de paiement et l’investissement en BFR de la société, penchons-nous sur la figure 3.2. Figure 3.2 Le cycle d’exploitation Achat de matières premières Commandées
Arrivées
Vente de produits finis Durée de rotation des stocks
Collecte d’argent
Délai de paiement des clients
Délai de règlement des fournisseurs Factures reçues
Temps
Règlement effectué Crédit interentreprises
Le crédit interentreprises correspond au nombre de jours entre la date à laquelle l’entreprise doit régler ses fournisseurs, et la date à laquelle elle commence à recevoir des clients le paiement des ventes. D’après la figure 3.2, on constate que le crédit interentreprises correspond à la somme de la durée de rotation des stocks et la durée de paiement des clients d’une part, moins la durée de paiement des fournisseurs d’autre part. Crédit interentreprises = durée de rotation des stocks + durée de paiement des clients – durée de paiement des fournisseurs Les investissements en BFR d’une société sont directement liés à la longueur de son crédit interentreprises. Si le délai de règlement des fournisseurs est suffisamment long pour permettre de couvrir la durée de rotation des stocks et du délai de paiement des clients, alors l’entreprise n’a pas du tout besoin de BFR. Quels types d’actions une société peut-elle entreprendre pour réduire son besoin en fonds de roulement ? D’après l’équation du crédit interentreprises, on peut déduire qu’une société peut réduire son BFR avec les actions suivantes : • Réduire la durée de stockage des biens. Ceci peut être réalisé en améliorant la méthode d’inventaire des stocks, ou bien en s’assurant que les fournisseurs ne livrent des matières premières qu’au moment précis où on en a besoin dans le cycle de production. • Accélérer le paiement des clients. Parmi les méthodes possibles pour accélérer la collecte des paiements, on peut citer : une meilleure gestion des factures restant à payer, l’octroi de remises pour les clients payant plus rapidement, l’octroi de pénalités pour les clients payant en retard. • Régler les fournisseurs plus lentement. Test 3.13
Comment une société peut-elle réduire son BFR ?
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PARTIE I La finance et le système financier
3.11 GESTION DE LA LIQUIDITÉ ET GESTION DE TRÉSORERIE Une histoire apocryphe raconte que le milliardaire Howard Hughes se retrouva un jour sans argent ni carte de crédit en un lieu où personne ne le reconnaissait. Sans moyens pour se payer de la nourriture, de la boisson, un hébergement ou un transport, le milliardaire fut à deux doigts de mourir de faim et d’épuisement. Le même phénomène s’applique aux sociétés : une société très rentable à moyen terme peut malgré tout éprouver de grandes difficultés, voire faire faillite, si elle n’a plus d’argent, ou de crédit, à court terme. Même si on ne peut pas dire qu’une société qui gère bien ses flux de trésorerie à court terme deviendra automatiquement très rentable, il est sûr que ne pas gérer correctement sa trésorerie peut conduire à la faillite. Le problème d’Howard Hughes est qu’il a été, temporairement, en situation d’illiquidité. Être liquide signifie pour une personne : avoir les moyens de faire un Approche « européenne continentale »
Approche « anglo-saxonne »
Ventes – Achats de matières premières – Autres achats et charges externes
Ventes – Coût des ventes
VALEUR AJOUTÉE (VA) – Salaires et charges sociales EXCÉDENT BRUT D’EXPLOITATION (EBE) – Amortissements et provisions RÉSULTAT D’EXPLOITATION (RE) + Produits financiers – Charges financières RÉSULTAT COURANT AVANT IMPÔT (RCAI) + Résultat exceptionnel – Impôt sur les sociétés RÉSULTAT NET
MARGE BRUTE (GROSS PROFIT) – Coûts administratifs, frais de siège RÉSULTAT AVANT AMORTISSEMENT, INTÉRÊTS ET IMPÔT (EBITDA) – Amortissements et provisions RÉSULTAT OPÉRATIONNEL (OPERATING PROFIT OU EBIT) + Produits financiers – Charges financières RÉSULTAT AVANT IMPÔT (EARNING BEFORE TAX) – Impôt + Résultat extraordinaire RÉSULTAT NET (NET EARNING)
paiement immédiat pour un achat, ou de rembourser une dette qui arrive à échéance. Être illiquide (ou en situation d’illiquidité) signifie pour une personne : être dans une situation où on a suffisamment d’argent pour acheter un bien ou rembourser une dette, mais ne pas avoir les moyens de le faire immédiatement.21 Pour éviter les risques d’illiquidité, les entreprises doivent prévoir attentivement leurs rentrées et leurs sorties de trésorerie. Le document qui établit cette prévision s’appelle un budget (ou plan) de trésorerie. Test 3.14
Pourquoi est-il important d’être liquide pour une société ?
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ANNEXE A La correspondance entre les indicateurs anglo-saxons et les indicateurs français Nous avons vu que, du fait de la présence de plusieurs référentiels comptables, les sociétés n’offrent pas toujours des comptes annuels directement comparables. Le recours à un tableau des flux de trésorerie, ou le retraitement des comptes, peuvent permettre de raisonner sur une base commune. Encore faut-il que l’information soit disponible pour procéder aux retraitements, ou que le tableau des flux de trésorerie soit suffisamment détaillé. Mais dans la pratique se pose un autre type de problème, que certaines personnes considèrent – à tort – comme un problème de pure forme : la traduction des indicateurs comptables en leur équivalent dans un autre référentiel comptable. Prenons un compte de résultat détaillé, présenté selon deux manières : la manière traditionnelle en Europe continentale (France, Allemagne, Espagne, Italie…), et la manière anglo-saxonne (États-Unis, Royaume-Uni, Australie…). On peut observer plusieurs différences majeures entre les deux référentiels comptables. Premièrement, l’approche « européenne continentale » détaille les produits et charges par nature (achats, salaires, etc.) tandis que l’approche « anglo-saxonne » raisonne par activités (opérations). Par exemple, le poste « coût des ventes » correspond à la somme de tous les coûts de production directement affectables aux produits vendus : les salaires des ouvriers feront partie du coût des ventes, de même que les dépenses d’énergie, les coûts de matières premières, tandis que les salaires des comptables, des dirigeants, ne seront pas inclus dans le coût des ventes. L’approche anglo-saxonne est donc fondamentalement une approche de comptabilité analytique (produits – coûts directs – coûts indirects). Deuxièmement, il n’y a pas identité entre résultat d’exploitation et résultat opérationnel. En effet, sur au moins deux points (l’amortissement des écarts d’acquisition, les cessions d’immobilisations), les deux résultats diffèrent. L’amortissement des écarts d’acquisition (ou survaleurs, ou goodwill) est généralement présenté en Europe tout en bas du compte de résultat, après l’établissement du résultat net. Par opposition, dans l’approche anglo-saxonne, cet amortissement est inclus avec les autres amortissements et provisions d’exploitation. L’autre point important concerne les cessions d’immobilisations : selon l’approche européenne, elles sont incluses dans le résultat exceptionnel, alors que pour les anglo-saxons, elles sont généralement intégrées dans les opérations d’exploitation sous une rubrique spécifique (discontinued operations). En résumé, le résultat d’exploitation est présenté avant déduction de l’amortissement d’écart d’acquisition, et sans prise en compte des cessions d’immobilisations, alors que le résultat opérationnel est généralement un solde net de ces deux indicateurs. Troisièmement, les systèmes fiscaux influent sur la logique de comptabilisation des sociétés. En Europe continentale, les documents comptables servent régulièrement au calcul de l’impôt sur les sociétés ; par opposition, dans les pays anglo-saxons, l’établissement de l’impôt est dissocié de la production des documents comptables. Il s’ensuit que la fiscalité influe beaucoup plus sur les comptes en Europe continentale que dans les pays anglo-saxons. Notamment, les postes « amortissement » et « provisions » vont obéir, en Europe, à une logique fiscale (charges déductibles de l’impôt) tandis qu’ils obéissent, dans les pays anglo-saxons, à une logique de marché (rendre compte de l’activité économique). Quatrièmement, la notion de résultat exceptionnel, en Europe, correspond à une notion plus large que celle du résultat extraordinaire anglo-saxon. Pour les anglosaxons, est extraordinaire ce qui n’était pas prévisible, et non-récurrent. Cela correspond à ce que les assureurs appellent « le fait de Dieu » (act of God) : tremblements de terre, catastrophes naturelles. Une cession de machine-outil sera donc intégrée dans le
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résultat exceptionnel en Europe, et dans le résultat d’exploitation dans les pays anglosaxons. Les distinctions entre ces deux types de référentiels comptables sont nombreuses, et en constante évolution22. Elles s’expliquent par des évolutions historiques différentes et par les divers niveaux de développement des systèmes financiers. La synthèse présentée ci-dessus ne saurait donc être exhaustive. Elle aidera toutefois le lecteur à comprendre que les analogies pratiquées couramment par les professionnels : « résultat d’exploitation = EBIT » et « excédent brut d’exploitation = EBITDA », peuvent être dangereuses.
LECTURES RECOMMANDÉES Bachy B., Sion M., Analyse financière des comptes consolidés : normes IFRS, 2e édition, Dunod, 2009. Eglem, J.-Y. et al, Comptabilité financière de l’entreprise, 2e édition, Gualino éditeur, 2008. Simon C., Bonnier C. (éds.), Comptabilité financière des groupes, Gualino éditeur, 2006. Thibierge C., Analyse financière, 3e édition, Vuibert, 2009.
RÉPONSES AUX TESTS Test 3.1 Quelles sont les trois utilités économiques des documents financiers ? RÉPONSE : • Ils fournissent des informations aux actionnaires et créanciers de l’entreprise sur la situation actuelle et les performances passées de la société. • Ils représentent un moyen facile, pour les actionnaires et les créanciers, de fixer des objectifs de performance et d’imposer des restrictions aux dirigeants de l’entreprise. • Ils constituent une base pour la planification financière. Test 3.2 Si ProdGen avait émis un nouvel emprunt obligataire à long terme de 50 millions pendant l’année N, et versé le montant ainsi collecté en disponibilités, quel aurait été l’impact sur le bilan à la fin de l’année N ? RÉPONSE : Le passif (précisément les dettes à long terme) et l’actif (précisément les disponibilités) auraient tous deux augmenté de 50 millions d’euros, et le montant des capitaux propres n’aurait pas bougé. Test 3.3 Si, au lieu de payer 10 millions de dividendes, la société ProdGen avait conservé la totalité de son résultat net, quel aurait été l’impact sur le compte de résultat et le bilan à la fin N ? RÉPONSE : Le résultat net serait resté inchangé. En revanche, le bilan à la fin N aurait indiqué 10 millions d’euros de plus en disponibilités et en capitaux propres. Test 3.4 Si, au lieu de payer 10 millions de dividendes, la société ProdGen avait conservé la totalité de son résultat net, quel aurait été l’impact sur le tableau des flux de trésorerie ? RÉPONSE : Si ProdGen n’avait pas versé 10 millions de dividendes, la société aurait pu emprunter 10 millions de moins. Aussi, dans le tableau des flux de trésorerie, le poste « dividendes » aurait été de zéro, et l’augmentation de la dette n’aurait été que de 84,6 millions d’euros.
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Test 3.5 Quelles informations potentiellement importantes peut-on trouver dans l’annexe des comptes d’une société ? RÉPONSE : • Une explication des méthodes comptables employées. • Un plus grand détail accordé à certains types d’actifs ou de passifs. • Une information sur la répartition du capital. • Un détail de l’évolution des immobilisations. • Un détail des éléments hors bilan. Test 3.6 Pourquoi la valeur de marché d’une action diffère-t-elle le plus souvent de sa valeur comptable ? RÉPONSE : La valeur comptable ne prend pas en compte tous les actifs et passifs de l’entreprise. De plus, les actifs et passifs enregistrés au bilan ne sont pas évalués à leur valeur de marché. Test 3.7 En N, la société Givre a dégagé un bénéfice par action de 5 euros et a payé aux actionnaires un dividende de 3 euros par action. La valeur comptable de l’action en début d’année était de 30 euros et son cours boursier était de 40 euros. À la fin de l’année, la valeur comptable de l’action est de 32 euros et le cours boursier est de 35 euros. Comparez la rentabilité financière (ROE) et la rentabilité boursière de la société Givre. RÉPONSE : Rentabilité financière = 5/30 = 16,67 % Rentabilité boursière = (3 + 35 – 40)/40 = – 5 % Test 3.8 Quels sont les cinq types de ratios utilisés dans une analyse financière ? RÉPONSE : Les cinq types de ratios mesurent la profitabilité, la rotation des actifs, l’endettement, la liquidité, et la valeur de marché de la société. Test 3.9 Si la société A a une rentabilité économique plus élevée que la société B, mais la même rotation d’actif, à quel niveau est sa marge d’exploitation ? RÉPONSE : La marge d’exploitation de A doit être supérieure à celle de B. Test 3.10 Si, dans une société, la rentabilité économique est égale au taux d’intérêt sur les dettes, quel sera l’impact d’une augmentation de l’endettement sur la rentabilité financière ? RÉPONSE : La rentabilité financière ne va pas changer. Test 3.11 Si les ventes prévisionnelles pour N + 1 étaient de 360 au lieu de 345,60 millions, quel serait le besoin de financement prévisionnel de ProdGen ? RÉPONSE : Le total de l’actif prévisionnel à la fin de N + 1 sera alors de 3,6 × 360, soit 1 296 millions d’euros. Aussi, l’augmentation de l’actif est de 1 296 – 1 036,8, c’est-à-dire 259,2 millions. Cette croissance de l’actif va être financée partiellement grâce au résultat incorporé en réserves et à l’augmentation des dettes d’exploitation, mais le reste du financement devra venir de sources externes. Les dettes d’exploitation vont augmenter de 18 % × l’augmentation des ventes (18 % représentant le ratio dettes d’exploitation/ventes), soit 0,18 × 72 = 12,96 millions. Calculons maintenant le résultat net prévisionnel. Le résultat d’exploitation est de 0,3 × 360, soit 108 millions. Les frais financiers restent à 87,26 millions. Les impôts représentent 40 % du résultat courant avant impôt, soit Impôts = 0,4 × (108 – 87,26) = 8,296.
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Le résultat net est donc de 108 – 87,26 – 8,296, ou encore 0,6 × (108 – 87,26), soit 12,444 millions. Comme ProdGen verse 30 % de son résultat en dividendes, le montant du résultat incorporé en réserves est de 0,7 × 12,444 = 8,711 millions d’euros. Besoin de financement additionnel = augmentation de l’actif – résultat incorporé en réserves – augmentation des dettes d’exploitation = 259,2 – 8,711 – 12,96 = 237,529 millions d’euros Test 3.12 Si une société croît à un taux inférieur à son potentiel de croissance, quelles sont les implications sur son financement ? RÉPONSE : La société pourra réduire son taux d’endettement, ou racheter ses propres actions. Test 3.13 Comment une société peut-elle réduire son BFR ? RÉPONSE : Soit en réduisant le montant des stocks, soit en accélérant la collecte des factures clients, soit en ralentissant le paiement à ses fournisseurs. Test 3.14 Pourquoi est-il important d’être liquide pour une société ? RÉPONSE : Une société très rentable à moyen terme peut malgré tout éprouver de grandes difficultés, voire faire faillite, si elle n’a plus d’argent, ou de crédit, à court terme.
QUESTIONS ET PROBLÈMES Les problèmes 3.1 à 3.8 se fondent sur les informations suivantes : La société Plus de Peluches ! présente un bilan à fin N – 1 qui est le suivant : Actif Actif immobilisé Machines – amortissement Machines nettes Mobilier – amortissement Mobilier net Total de l’actif immobilisé
Passif 25 000 – 2 500 22 500 16 000 – 2 000 14 000 36 500
Actif circulant Stocks Créances clients Disponibilités Total de l’actif circulant
57 000 35 000 27 300 119 300
Total de l’actif
155 800
Capitaux propres Capital social Réserves Total des capitaux propres
45 000 16 300 61 300
Dettes long terme
25 000
Dettes d’exploitation Fournisseurs d’énergie à payer Salaires Dettes fournisseurs Total des dettes d’exploitation
1 500 3 000 65 000 69 500
Total des dettes
94 500
Total du passif
155 800
Durant l’année N, Plus de Peluches ! a réalisé les opérations suivantes : a. Au début de l’année, achat d’une machine à produire des peluches pour 21 000 euros : 9 000 payés au comptant, et 12 000 à régler sur 3 ans. b. Ventes au comptant : 115 000 euros ; ventes à crédit : 316 000 euros. c. Achats de matières premières et services : 207 000 euros.
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d. Règlement des fournisseurs de matières premières et services : 225 000 euros. e. Règlement de loyers : 43 000 euros. f. Règlement de primes d’assurances : 23 000 euros. g. Règlement des fournitures d’énergie : 7 500 euros. Sur ce montant, 1 500 soldent la dette de l’année N – 1 sur les fournisseurs d’énergie. h. Règlement des salaires : 79 000 euros. Sur ce montant, 3 000 soldent la dette de l’année N – 1 sur les salariés. i. Règlement d’autres fournitures de services : 4 000 euros. j. Collecte de 270 000 euros de la part de clients qui avaient acheté à crédit. k. Taux d’intérêt sur les dettes financières : 10 % par an. Le dernier intérêt a été payé le 31/12/N – 1. Autres informations : a. Les machines ont une durée de vie économique de 20 ans, avec une valeur résiduelle nulle. Les machines ont déjà été amorties sur 2 ans. b. Le mobilier a une durée de vie économique de 8 ans, avec une valeur résiduelle nulle. Le mobilier a déjà été amorti sur 1 an. c. La nouvelle machine à produire des peluches a une durée de vie estimée de 7 ans, et n’aura probablement pas de valeur résiduelle. d. Le taux d’imposition est de 35 % et les impôts sont payés le 31 décembre de chaque année. e. Si possible, le taux de distribution du résultat net (Pay out) sera de 10 %. f. Les consommations de matières premières ont été de 250 000 euros pendant l’année. g. Compte clients à la fin de l’année = Compte clients au début de l’année – paiements effectués par les clients pendant l’année + ventes à crédit sur l’année. h. Dettes d’exploitation à la fin de l’année = Dettes d’exploitation au début de l’année + achats aux fournisseurs sur l’année – paiements effectués aux fournisseurs pendant l’année. i. Stocks à la fin de l’année = Stocks au début de l’année + achats de matières premières pendant l’année – consommation de matières sur l’année. j. Le cours de l’action de la société était de 4,62 euros au 31/12/N – 1. 20 000 actions étaient cotées en Bourse à cette date. 3.1. Établissez le bilan de la société Plus de Peluches ! au 31/12/N. 3.2. Établissez le compte de résultat pour l’année N. 3.3. Établissez le tableau des flux de trésorerie pour l’année N. 3.4. Calculez les ratios de profitabilité suivants : marge d’exploitation, rentabilité économique, rentabilité financière. 3.5. Calculez les ratios de rotation d’actif suivants : rotation des créances clients, rotation des stocks, rotation de l’actif. 3.6. Calculez les ratios d’endettement et de liquidité suivants : endettement, couverture des intérêts, liquidité générale, liquidité immédiate. 3.7. Quelle est la valeur comptable de l’action Plus de Peluches ! à la fin de l’année N ? 3.8. Calculez le PER et le Market to book de la société.
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3.9. Vous disposez des informations suivantes, tirées des rapports annuels des sociétés Computronics et Digitek. (Les chiffres sont en millions d’euros, sauf indication contraire). Computronics
Digitek
153,7 40,0 % 317,6 54,7 2 457,9 3 379,3 1 113,3
239,0 20,0 % 403,1 4,8 3 459,7 4 537,0 2 347,3
15 € 12 € 200 millions
38 € 40 € 100 millions
Résultat net Taux de distribution (Payout) Résultat d’exploitation Frais financiers Total de l’actif moyen sur l’année Ventes Capitaux propres moyens sur l’année Cours boursier de l’action : – au début de l’année – à la fin de l’année Nombre d’actions cotées
Évaluez et comparez les performances de ces deux sociétés, à la lumière des ratios présentés dans ce chapitre. 3.10. En vous fondant sur les documents financiers suivants : Compte de résultat Ventes Achats et charges externes Valeur ajoutée Frais fixes d’exploitation : – Dépenses de publicité – Loyers – Commissions des vendeurs – Fournitures d’énergie Résultat d’exploitation Frais financiers Résultat courant avant impôts Impôt (35 %) Résultat net Dividendes (taux de distribution 40 %) Résultat mis en réserves Bilan Actif Immobilisations corporelles Stocks Créances clients Disponibilités Total de l’actif
N–1
N
1 200 000 750 000 450 000
1 500 000 937 500 562 500
50 000 72 000 48 000 15 000 265 000 106 000 159 000 55 650 103 350 41 340 62 010
62 500 90 000 60 000 18 700 331 250 113 000 218 250 46 388 141 863 56 745 85 118
N–1
N
1 800 000 700 000 200 000 300 000 3 000 000
2 250 000 875 000 250 000 375 000 3 750 000
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N + 1 (p)
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Passif Capitaux propres – Capital social – Réserves Dettes financières long terme (intérêt 7 %) Dettes d’exploitation Dettes financières court terme (intérêt 10 %) Total du passif
1 100 000 300 000 800 000 300 000 500 000 3 000 000
113
1 100 000 385 118 900 000 375 000 989 882 3 750 000
a. Identifiez les postes qui varient en proportion des ventes entre N – 1 et N. b. Calculez la croissance des ventes entre N – 1 et N. c. Quelle était la rentabilité financière de la société (ROE) en N ? Pouvez-vous la calculer pour N – 1 ? d. Quel a été le besoin de financement externe de la société pour l’année N ? D’où est venu ce financement externe ? e. Établissez les documents financiers prévisionnels pour N + 1, en utilisant les hypothèses suivantes : – Taux de croissance des ventes = 15 % – Remboursement de 100 000 euros de dettes court terme le 01/01/N + 1 – Les taux d’intérêts sur les dettes financières sont ceux indiqués au bilan. Ces taux s’appliquent aux montants de dettes en début d’année N + 1. Notez bien que la société aura remboursé une partie de sa dette financière court terme au 01/01/N + 1. – Le taux de distribution sera réduit à 30 % du résultat net. 1) Quelle sera la rentabilité financière prévisionnelle de la société pour N + 1 ? 2) Quel montant de financement externe (additionnel) sera nécessaire à la société en N+1? 3) La société prévoit de répondre à 40 % de ce besoin de financement en réalisant une augmentation de capital. Puis elle empruntera à long terme, pour un maximum de 100 000 euros. Enfin, le solde du besoin sera financé par de la dette financière à court terme. Établissez le bilan prévisionnel à fin N + 1. a. La société anticipe que le taux d’impôt sur les sociétés va augmenter à 38 %. Si cette augmentation a effectivement lieu, quel sera le besoin de financement additionnel ? 3.11. Reprenez les documents prévisionnels établis dans l’exercice 3.10 (avec un taux d’imposition à 35 %) et : a. Bâtissez un nouveau prévisionnel pour N + 1 en prenant cette fois un taux de croissance des ventes de 10 %. Quel sera le besoin de financement supplémentaire dans ce cas ? b. Établissez maintenant les documents prévisionnels pour N + 2, en supposant que la croissance des ventes entre N + 1 et N + 2 sera de 20 %. Quel sera le besoin de financement pour N + 2 ? La société prévoit de couvrir la totalité de ce besoin par un financement de dettes à court terme. 3.12. La société Dettes avant tout prépare ses documents prévisionnels pour l’année prochaine. Elle prévoit une croissance de l’actif de 50 millions d’euros, une croissance des capitaux propres (grâce au résultat mis en réserves) de 25 millions d’euros, et une augmentation des dettes d’exploitation de 40 millions d’euros. On sait par ailleurs que la société a des dettes financières à long et à court terme, et que ses capitaux propres sont constitués du capital social et des réserves.
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a. Le directeur financier de la société vous demande de calculer le montant du besoin de financement additionnel pour l’année prochaine. Que lui répondez-vous ? b. Quelles actions la société Dettes avant tout peut-elle entreprendre pour gérer la situation que vous avez identifiée ? 3.13. Reclassez les étapes suivantes dans l’ordre chronologique le plus probable lors d’une planification financière : – Estimation des besoins de financement pour mettre en œuvre les politiques opérationnelles. – Établissement du plan de financement définitif et des budgets, pour toute la société. – Le PDG et les responsables fixent les objectifs stratégiques de l’entreprise (par exemple, augmenter les parts de marché de 10 % à 12 %). – Les responsables opérationnels établissent des plans d’action pour répondre aux objectifs stratégiques fixés. – Le plan stratégique et les budgets des différentes divisions sont corrigés, en fonction des informations fournies par les responsables de divisions sur leurs ressources disponibles (personnel, argent). – Choix de la source de financement externe à privilégier. – Le PDG et les responsables intègrent les budgets des différentes divisions en un document prévisionnel pour l’ensemble des activités. – La société détermine le montant de son besoin de financement additionnel. – Les politiques et les budgets au niveau opérationnel sont revus avec les responsables de division. Les politiques opérationnelles sont classées par ordre de priorité. – Les responsables des différentes divisions revoient les objectifs stratégiques avec leurs directeurs opérationnels. 3.14. La société Play Mobiles, qui vend des téléphones portables, présente des documents financiers extrêmement synthétisés : N Compte de résultat Frais financiers Résultat courant avant impôt Résultat net (après impôt à 33 %) Dividendes Résultat mis en réserves Bilan Total de l’actif Capitaux propres Dettes financières Dettes d’exploitation
N + 1 (p) 100 25 75 50 20 30
800 420 300 80
1 000 450 450 100
En millions d’euros
Les frais financiers prévisionnels de 25 millions pour l’année N + 1 sont calculés sur la foi d’un taux d’intérêt de 8,33 % par an appliqué au montant des dettes financières à fin
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N, soit 300 millions d’euros. La dette financière va augmenter à 450 pour répondre au besoin de financement calculé selon la relation suivante : Besoin de financement additionnel = augmentation de l’actif – résultat incorporé en réserves – augmentation des dettes d’exploitation a. La société augmente le montant de sa dette financière dès le début de l’année N + 1, au lieu de l’augmenter à la fin de l’année N + 1. Quel problème cela va-t-il poser dans l’utilisation des documents prévisionnels pour calculer le besoin de financement additionnel pour N + 1 ? b. Ce type de problème est-il d’une grande importance ? Pourquoi ? 3.15. Une société dégage un résultat net de 20 millions d’euros en N, et le total de son actif à la fin N – 1 était de 450 millions. Les dirigeants souhaitent maintenir le ratio dettes/capitaux propres à son niveau actuel, soit 0,8, mais n’ont plus le droit d’emprunter ou d’émettre de nouvelles actions. a. Quel est le potentiel de croissance de cette société ? b. Sur le résultat net de 20, la société verse un dividende de 6 millions, et prévoit de conserver ce taux de distribution à l’avenir. Quel est alors son potentiel de croissance ? c. Dans un autre cas de figure, sur les 20 millions de résultat net, la société utilise 12 millions pour racheter des actions. Quel est alors son potentiel de croissance ? d. Si la société prend en même temps les décisions b. et c., quel sera son potentiel de croissance ? 3.16. Questions sur la gestion du BFR : a. Vous êtes propriétaire d’une société qui fabrique des billards. Il y a un mois, vous avez engagé un consultant pour qu’il analyse votre activité et suggère des améliorations. Les recommandations du consultant, si elles sont adoptées, vous permettront de réduire de 20 jours le délai entre les ventes et le règlement des clients, mais augmenteront de 5 jours le délai de stockage (c’est-à-dire le délai entre les achats de matières premières et les ventes de produits finis), et réduiront de 15 jours le délai entre l’achat de matières premières et votre paiement des factures au fournisseur. Allez-vous adopter les recommandations du consultant ? Pourquoi ? b. En général, une bonne gestion du crédit interentreprises consiste à réduire (minimiser) le délai de paiement des clients, et à allonger (maximiser) le délai de paiement aux fournisseurs. Expliquez comment doit se faire cette gestion, si votre société offre des ristournes aux clients qui paient plus tôt, et refuse de profiter des ristournes de fournisseurs en allongeant ses délais de paiement. c. Nous sommes le 8 mars N, et vous consultez votre compte bancaire : vous avez un encours de carte de crédit de 2 000 euros. Le débit de cette somme ne sera effectué que le 31 mars, mais votre conjoint panique à la vue de ce montant, et voudrait que vous le payiez immédiatement. Si vous appliquez les principes de gestion du crédit interentreprises à votre situation personnelle, alors allez-vous décider de régler tout de suite cette somme ? Pourquoi ? Quels dangers cette stratégie peut-elle induire ? d. Certains vendeurs de canapés organisent des périodes de promotion pendant lesquelles les clients peuvent soit acheter un canapé au comptant, et dans ce cas, bénéficient d’une remise immédiate sur le prix de vente, soit choisir de payer en plusieurs fois sans frais. En terme de durée de crédit, (1) Pourquoi ces sociétés offrent-elles une remise ? (2) Pourquoi ces sociétés proposent-elles de payer en plu-
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sieurs fois sans frais, c’est-à-dire pourquoi se condamnent-elles à un règlement différé ? Quel risque les sociétés supportent-elles dans le cas des paiements différés, par rapport au paiement comptant avec remise ? e. Quelle est, à votre avis, la fréquence à laquelle une société surveille son BFR et gère les problèmes ? Quelle est, à votre avis, la fréquence à laquelle elle établit sa planification financière en prévoyant les ventes futures et en calculant ses besoins de financement additionnels ? Comparez ces deux fréquences et expliquez-en la différence. f. Quand une société surveille attentivement l’évolution de son BFR, quel problème cherche-t-elle à éviter ? 3.17. Comment seront comptabilisés les actifs suivants, aux bilans des sociétés qui les détiennent ? a. Un bulletin de Loto gagnant. b. Une chanson à succès (un tube). c. Un film qui n’a pas connu de succès (un navet). 3.18. Finances personnelles. Montrez comment vous comptabiliseriez les opérations suivantes dans votre compte de résultat, bilan et tableau des flux de trésorerie personnel. a. Le 1er juillet N, vous recevez 20 000 euros de cadeaux pour vous féliciter d’avoir terminé vos études avec succès. Vous en profitez pour rembourser 10 000 euros sur un prêt étudiant. b. Le 1er août N, vous décrochez un emploi de cadre financier à la Compagnie des Services Financiers et Autres. Vous avez négocié un salaire de 4 000 euros par mois, qui sera versé le dernier jour de chaque mois. c. Le 31 août N, vous recevez votre premier bulletin de salaire, qui s’établit ainsi : Salaire brut Prélèvement à la source Charges sociales : Sécurité sociale Charges sociales : assurance maladie Charges sociales : cotisation retraite Charges patronales : Sécurité sociale Charges patronales : assurance maladie Charges patronales : cotisation retraite Salaire net versé Total des charges patronales
5 000 1 400 500 150 200 300 200 150 1 750 650
d. Le 1er septembre N, vous achetez une nouvelle voiture 20 000 euros. Vous versez immédiatement 5 000 et empruntez les 15 000 restants auprès de la Compagnie des Services Financiers et Autres au taux d’intérêt de 1 % par mois. Le remboursement fixe est de 498,21 euros par mois sur 36 mois. e. En tant que particulier ou ménage, pourquoi souhaiteriez-vous établir un bilan personnel ? À quelle fréquence devriez-vous actualiser ce bilan ? Devriez-vous comptabiliser les actifs et passifs à leur valeur historique ou à leur valeur de marché ?
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3.19. Utilisation de l’information comptable. Vous voulez prendre vos vacances de Pâques en Tunisie, dans deux mois. Vous utilisez un service sur Internet pour trouver le billet d’avion le moins cher pour un Paris-Tunis. Le billet le moins cher est proposé par la compagnie FiaMa (compagnie aérienne sicilienne). Vous n’avez jamais entendu parler de cette compagnie auparavant, et vous vous demandez quel est le risque que cette compagnie fasse faillite avant la date de votre départ dans deux mois. Comment pouvez-vous vous procurer des informations financières sur Internet (par exemple sur Yahoo Finance http://finance.fr.yahoo.com) pour évaluer le risque que vous prenez en achetant un billet FiaMa ? À quelles autres entreprises allez-vous comparer FiaMa ?
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