la consommation d'aliment contaminé par 1600 µg/kg de DON reçu en phase de croissance ... d'aliment naturellement contaminé par du déoxynivalénol (DON).
2004. Journées Recherche Porcine, 36, 301-308.
Effets zootechniques et immunitaires de la consommation d’aliment naturellement contaminé par du déoxynivalénol (DON) chez le porc en phase de croissance ou de finition Philippe PINTON (1), Eric ROYER (2), Francesc ACCENSI (1), Daniela MARIN (1), Jean-François GUELFI (3), Nathalie BOURGÈS-ABELLA (3), Robert GRANIER (5), François GROSJEAN (4) et Isabelle P. OSWALD (1) (1) INRA-Unité de Pharmacologie-Toxicologie, 180 chemin de Tournefeuille, 31931 Toulouse cedex 9 (2) ITP, Pôle Techniques d’élevage, 34 boulevard de la Gare, 31500 Toulouse (3) Ecole Nationale Vétérinaire, 23 chemin des Capelles, 31076 Toulouse cedex 3 (4) Arvalis - Institut du végétal, 27 rue de la Vistule, 75013 Paris (5) Avec la collaboration technique des personnels ITP de la Station d’Expérimentation Nationale Porcine, Les Cabrières, 12200 Villefranche de Rouergue
Effets zootechniques et immunitaires de la consommation d’aliment naturellement contaminé par du déoxynivalénol (DON) chez le porc en phase de croissance ou de finition Un essai a été conduit sur 3 groupes de 48 porcs afin d’étudier les effets sur la croissance et la réponse immunitaire de la consommation d’aliment contaminé par 1600 µg/kg de DON reçu en phase de croissance (traitement T2) ou en phase de finition (traitement T3). Un groupe contrôle a été constitué avec des animaux recevant un aliment non contaminé (traitement T1). En phase de croissance, la consommation d’aliment et la vitesse de croissance des animaux du traitement T2 sont supérieures à celle des traitements T1 et T3. En finition, les écarts de performances zootechniques entre les traitements ne sont pas significatifs. L’hémogramme n’est pas affecté par la consommation de DON quelle que soit la période. En revanche, les paramètres immunitaires des animaux ayant consommé du DON en phase de croissance (traitement T2) sont significativement modifiés : augmentation de la prolifération lymphocytaire et de la concentration en IgA, diminution de la concentration en IgG. Lorsque les animaux consomment de nouveau un aliment non contaminé en finition (traitement T2), l’augmentation de la capacité de prolifération lymphocytaire persiste alors que les concentrations en IgA et IgG retrouvent des valeurs basales. En phase de finition, la présence de DON dans l’aliment n’affecte pas les paramètres immunitaires (traitement T3 versus T1). En conclusion, le DON présent dans l’alimentation à une teneur moyenne pendant une longue phase affecte le système immunitaire des porcs et les animaux en phase de croissance sont plus sensibles que les animaux en phase de finition. Effects of feeding growing or finishing pigs with deoxynivalenol (DON) naturally contaminated feed on growth performance and immunological status A feeding trial with 3 groups of 48 growing pigs was conducted to determine the effects of feeding a naturally deoxynivalenol contaminated diet (1600 µg/kg DON) on performance and selected haematological and immunological parameters. Animal were fed with contaminated diet during the growing (T2 treatment) or the finishing (T3 treatment) period. Another group (T1 treatment) receive non-contaminated feed. During the growing period, feed consumption and growth rate were higher in the T2 treatment than in the two other treatments (T1 and T3). By contrast, during the finishing period, no significant differences in the performance were observed between the different treatments. The haematological parameters exhibit no differences between the treatments neither in the growing nor in the finishing period. By contrast, the immunological parameters were significantly altered in pigs fed with DON contaminated diet during the growing period (T2 treatment): increased lymphocyte stimulation upon mitogenic stimulation, increased IgA serum concentration and decrease IgG serum concentration. When the animals fed with contaminated diet during the growing period return to non-contaminated diet during the finishing period (T2 treatment) the increase lymphocyte proliferation persisted whereas the concentrations in IgA and IgG return to basal levels. In the finishing period, the presence of DON in diet did not affect the immunological parameters (T3 versus T1 treatments). In conclusion, diet contaminated with low level of DON affects the immune response of the pigs and the animals were more susceptible when they ingest DON contaminated feed in the growing than in the finishing period.
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INTRODUCTION Dans les conditions climatiques et techniques de production que l’on rencontre en France, le blé représente un substrat potentiellement favorable au développement de moisissures du genre Fusarium qui peuvent produire des mycotoxines. La fusariotoxine la plus souvent détectée est le déoxynivalénol (DON) que l’on rencontre à des concentrations généralement inférieures à 750 µg/kg (BAKAN et al, 1998 ; GROSJEAN et NIQUET, 1999 ; DGAL, 2001) mais qui peuvent atteindre 4000 à 5000 µg/kg. Le porc est exposé à la contamination par le DON en raison de la nature des matières premières qui constituent son alimentation et il apparaît plus sensible que les volailles et les ruminants (ROTTER et al, 1996). A des concentrations élevées (15 à 20 000 µg/kg), le DON provoque refus alimentaire et vomissements. Aux faibles concentrations, plusieurs études réalisées sur des porcelets ou sur des porcs en croissance ont montré que le DON peut altérer la consommation alimentaire et le système immunitaire (ROTTER et al, 1996 ; D’MELLO et al, 1999 ; SWAMY et al, 2002). Plusieurs essais montrent que chez le porc l’indice de consommation n’est affecté qu’à partir de 3000 µg/kg (D’MELLO et al, 1999 ; GROSJEAN et al, 2003a). L’effet sur la réponse immunitaire a été mis en évidence par l’augmentation de la concentration sérique en immunoglobulines de classe A (GROSJEAN et al, 2002 ; SWAMY et al, 2002) mais aussi par l’augmentation de la prolifération des lymphocytes après stimulation in vitro par un agent mitogène (ØVERNES et al, 1997 ; GROSJEAN et al, 2002). Les résultats de la bibliographie montrent qu’il existe une variabilité certaine dans la réponse des animaux à la consommation d’aliment contaminé par le DON tant au niveau des paramètres zootechniques (GROSJEAN et al, 2003a ; D’MELLO et al, 1999) que de la réponse immunitaire (BERGSJØ et al, 1993 ; ØVERNES et al, 1997). Par ailleurs, la comparaison des résultats des différentes études est rendue difficile par le fait que selon les essais, les animaux reçoivent une alimentation contaminée par le DON à des âges différents, en post-sevrage (SWAMY et al, 2002 ; GROSJEAN et al, 2003b) et /ou en engraissement (BERGSJØ et al, 1993 ; ØVERNES et al, 1997) selon des régimes et des protocoles différents. Cet essai, réalisé chez le porc charcutier, avait pour objectif de comparer les impacts de la consommation d’aliment à base de blé et contaminé par environ 1600 µg/kg de DON pendant les phases de croissance et de finition sur les paramètres zootechniques et la réponse immunitaire des animaux. 1. MATÉRIEL ET MÉTHODES 1.1. Composition et caractéristiques des blés et des aliments Deux lots de blé (sain ou fusarié) ont été sélectionnés par ARVALIS-Institut du végétal. L’analyse de la composition en mycotoxines du blé fusarié a montré une contamination en DON de 2038 µg/kg et en zéaralénone de 227 µg/kg. La
présence d’autres trichothécènes de type A ou B ou d’ochratoxine n’a pas été détectée. Deux aliments expérimentaux de type croissance ont été fabriqués à la station ITP de Villefranche (12) à partir de ces lots de blé (sain ou fusarié), de tourteau de soja, d’acides aminés industriels, de complémentation minérale. Afin d’augmenter les chances d’évaluer les effets éventuels des toxines, les aliments ont été formulés avec des teneurs en blé élevées. Compte tenu de l’humidité importante du blé fusarié (17,3 %), la concentration énergétique est proche de 9,8 MJ EN par kg brut pour l’aliment sain et de 9,4 MJ EN pour l’aliment fusarié. Par kg de matière sèche, la concentration énergétique est identique et atteint 11,2 MJ EN. Les deux formules ont un taux de lysine digestible de 0,9 g par MJ EN et les rapports entre les autres acides aminés et la lysine sont identiques (tableau 1). Tableau 1 - Caractéristiques des aliments Valeurs de formulation DON Zéaralénone Matière sèche Matières azotées totales Cellulose brute Amidon Matières grasses Matières minérales Lysine totale Lysine digestible ED kcal EN MJ Lys d / EN Valeurs mesurées DON Zéaralénone
témoin
DON
0 0 872 175 27 473 15 54 9,98 9,05 3276 9,81 0,92
1590 177 840 168 27 443 15 51 9,76 8,84 3143 9,40 0,94
30 0
2000 157
en g pour 1000 g sauf mycotoxines en µg/kg.
1.2. Animaux et schéma expérimental L’essai a eu lieu à la station de Villefranche sur une bande de 144 animaux mâles et femelles de type (LW x LD) x P76, conduits en sexes séparés de 27 kg à l’abattage. Les animaux ont été répartis en 8 cases de 6 et affectés à chacun des 3 traitements (24 mâles castrés et 24 femelles). Trois traitements ont été comparés : T1 : aliment sain en croissance et en finition, T2 : aliment fusarié en croissance et aliment sain en finition, T3 : aliment sain en croissance et aliment fusarié en finition. Les animaux ont été alimentés en soupe, avec une distribution proche de l’ad libitum, en 13 repas par semaine. Les rations ont été ajustées chaque jour à l’appétit des porcs, de façon à limiter la présence de refus dans les auges lors du repas suivant. 1.3. Variables mesurées 1.3.1. Paramètres zootechniques Les animaux ont été pesés individuellement à la mise en lots puis par quinzaine. Les quantités d’aliment et de refus ont
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été notées quotidiennement par case. Après abattage, le poids de carcasse chaud, les épaisseurs de gras et de muscle ont été mesurés. La teneur en viande maigre a été estimée selon l’équation TVM de 1997. Enfin, des notations d’ulcères gastro-oesophagiens selon la grille de HENRY et BOURDON (1969), ainsi que des notations de lésions pulmonaires (ITP, 1993) ont été effectuées.
2. RÉSULTATS 2.1. Résultats des analyses des aliments utilisés Une bonne cohérence entre les valeurs formulées et les valeurs analysées est constatée pour les deux aliments. Les analyses de mycotoxines sur les aliments fabriqués confirment les teneurs mesurées sur les différents lots de matières premières.
1.3.2. Paramètres hématologiques Des prélèvements sanguins ont été réalisés à la veine jugulaire gauche dans des tubes contenant de l’EDTA sur 16 animaux mâles affectés à chacun des régimes à l’âge de 15 semaines (34 jours de traitement en phase de croissance) et 23 semaines (44 jours de traitement en phase de finition). La formule leucocytaire a été établie au microscope photonique sur cent globules blancs à partir d’un étalement de sang coloré par la méthode de May Grünwald Giemsa. Les autres constituants et paramètres de l’hémogramme (numérations des hématies, des leucocytes et des plaquettes, hématocrite, hémoglobinémie, volume globulaire moyen) ont été obtenus à l’aide d’un compteur de type variation d’impédance, le MS9 (Melet Schloesing, Cergy-Pontoise, France).
2.2. Effets sur les paramètres zootechniques et d’abattage 2.2.1. Consommation journalière Pendant la phase de croissance, la distribution de l’aliment fusarié aux animaux du traitement T2 se traduit par une augmentation de 12 % en kg brut de la consommation journalière d’aliment par rapport aux animaux recevant l’aliment sain (traitements T1 et T3). Ceci, compte tenu de l’écart des teneurs en matière sèche des aliments, correspond à une amélioration significative de 7% de l’ingestion journalière d’énergie par les animaux (figure 1). 3,0
1.3.3. Paramètres immunitaires La concentration plasmatique en immunoglobulines et la prolifération des lymphocytes ont été mesurées à partir de sang issu des 48 mêmes animaux prélevé sur héparine de sodium. La concentration totale en immunoglobulines a été déterminée par ELISA dans les plasmas dilués au 1/4000e (IgA), 1/80000e (IgG) selon le protocole du fournisseur (Béthyl, Interchim, Montluçon, France). La capacité de prolifération des lymphocytes a été évaluée après dilution du sang au 1/30e dans du DMEM en présence de 10 µg/mL de concanavaline A, un agent mitogène. Après 48 h de culture, 0,5µCi de 3H-méthylthymidine par puit ont été ajoutés. La prolifération lymphocytaire a été évaluée à l’issue de 24 heures de culture additionnelle par le dosage en scintillation liquide de la radioactivité incorporée dans les cellules et rapportée à la concentration en globules blancs de chaque animal. 1.4. Statistiques L’analyse de variance est effectuée à l’aide du logiciel SAS. Elle inclut les effets traitement, sexe, groupe et l’interaction traitement – sexe pour les variables individuelles (GMQ, TVM, rendement, G1, G2, M2, M6), et les effets traitement, sexe, catégorie de poids et leurs interactions pour les variables collectives par case (consommations journalières et IC). Les comparaisons des moyennes sont effectuées à l’aide du test de Tukey. Le test de chi2 est utilisé pour l’analyse des notations d’ulcères et de lésions pulmonaires. Les résultats des paramètres hématologiques et immunitaires sont représentés par leur moyenne ± l’erreur standard. La comparaison des moyennes a été réalisée à l’aide d’un test t de Student pour situation bilatérale au seuil de risque a=5%.
2,5
kg 2,0 T1 T2
1,5
T3 1,0 0
14
28
42
56 jours
70
84
98
Figure 1 - Evolution des consommations journalières (en kg à 87 % MS, réajustées sur 14 repas) En finition, les animaux du traitement T2 ayant reçu l’aliment fusarié en croissance alignent leur consommation sur celle du traitement T1. Par contre, les animaux du traitement T3 augmentent rapidement leur consommation d’aliment. Ceci se traduit, par rapport au traitement T1, par une différence d’ingestion d’énergie de 8 % proche de la signification statistique (p = 0,07). Sur l’ensemble de l’essai, les animaux témoins du traitement T1 ont consommé une plus faible quantité d’énergie journalière que les animaux des traitements T2 et T3, mais les différences respectives de 2,5 % et 5 % ne sont pas significatives (p = 0,11). 2.2.2. Vitesse de croissance Pendant la phase de croissance, les gains de poids des animaux T2 recevant l’aliment fusarié atteignent 819 g par jour contre 770 g pour les animaux des traitements T1 et T3 recevant l’aliment sain, soit une augmentation significative de 6 %. En phase de finition, aucune différence significative du gain de croissance n’apparaît (p = 0,21) même si la croissance des porcs du traitement T2 est en retrait de celle des
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Tableau 2 - Performances zootechniques et résultats d'abattage
Effectif initial Effectif final Poids initial, kg Poids intermédiaire, kg Période de croissance Consommation, MJ EN/j G.M.Q. g/j I.C., MJ/j Période de finition Consommation, MJ EN/j G.M.Q. g/j I.C., MJ/j Période totale Consommation, MJ EN/j G.M.Q. g/j I.C., MJ/j Abattage Poids abattage, kg Rendement, % Teneur Viande Maigre Epaisseur gras G1, mm Epaisseur gras G2, mm Epaisseur muscle M2, mm Note ulcères (sur 7) Note pneumonie (sur 28)
1 témoin témoin 48 44 26,7 63,6 b
Traitements 2 DON témoin 48 47 26,7 66,0 a
3 témoin DON 48 41 26,7 63,6 b
18,35 b 770 a 23,8
19,66 a 819 b 24,0
23,52 779 30,0 b
Sexe
ETR (1)
Stat. (2)
72 69 26,6 63,0
3,6
T**, S***, C**
19,42 815 23,9
18,16 758 23,7
0,36 74 0,9
T***, S***, C**, TxC* T**, S*** ns
25,44 774 32,3 a
25,80 786 32,4
22,48 746 30,0
1,7 100 1,0
S** S* T*, S**
21,78 778 28,0
22,29 772 28,5
22,91 798 28,4
20,62 752 27,3
0,89 72 0,9
S*** S*** S*
110,6 78,3 62,7 15,7 12,5 59,0 1,8 0,8
110,3 78,0 61,9 16,6 13,4 57,3 1,9 0,7
111,3 78,1 61,7 16,4 13,5 57,3 1,8 0,6
109,9 78,1 63,0 15,6 12,4 59,1 1,7 0,8
0,01 2,29 3,00 3,07 4,68
TxS* S** ns S* S* ns ns
Castrés
Femelles
72 63 26,8 65,9
18,37 b 770 a 23,6
23,45 745 31,4 a
21,22 776 27,2 110,8 78,0 62,5 15,7 12,9 58,3 1,8 0,6
(1)
Ecart type résiduel. T: traitement, S : sexe, C : catégorie de poids; * : p