C'EST A LA MISERE QU'IL FAUT S'ATTAQUER PAS AUX IMMIGRES ! ... Si l'on
ne peut accueillir toute la misère du monde, encore faudrait-il combattre ce qui ...
C’EST A LA MISERE QU’IL FAUT S’ATTAQUER PAS AUX IMMIGRES ! La « “maîtrises de l’immigration” dicte souvent de distinguer entre deux figures de l’exil – la fuite et la migration –, et de ne donner asile qu’à ceux qui ne peuvent attendre le moindre bénéfice économique de leur immigration. Cette condition atteint ou en tout cas tend vers l’absurde : comment un réfugié purement politique pourrait-il prétendre être accueilli sans qu’aucun avantage économique soit impliqué dans son nouvel habitat ?… Cette distinction entre l’économique et le politique n’est donc pas seulement abstraite ou inconsistance, elle devient hypocrite et perverse ; elle permet à la limite de ne presque jamais accorder d’asile politique, et même, si l’on veut, de ne jamais appliquer la loi dès lors que celle-ci dépendrait totalement, dans sa mise en œuvre, de considération opportuniste, parfois électorales et politiciennes, relevant elles aussi, en fin de compte, de l’ordre de la police, de fantasmes ou de réalités sécuritaires, de la démographie ou du marché. le discours sur le refuge, l’asile ou l’hospitalité deviennent alors de purs alibis rhétoriques. » (Jacques Derrida) Depuis très longtemps l’immigration est associée à la misère. Ainsi « on ne peut accueillir toute la misère du monde », selon Roccard. L’ouverture des frontières développerait le chômage, conduirait à l’explosion des systèmes de protection sociale. Afin de préserver la dignité des immigrés, il faudrait que l’Etat contrôle les conditions matérielles de vie (ressources suffisantes, logement décent…) pour que l’étudiant d’origine étrangère s’inscrive en fac ou qu’un étranger puisse venir rendre visite à sa famille vivant en France. Si l’on ne peut accueillir toute la misère du monde, encore faudrait-il combattre ce qui la génère de part le monde. Autrement dit, on ne peut rendre responsables des personnes victimes des rapports Nord/Sud/Est : l’exploitation du Sud, de l’Est et l’abandon de certaines régions africaines par exemple. Lorsque le FMI et la Banque Mondiale imposent à certains gouvernements de développer des cultures d’exportation (coton, café, arachides…) au détriment des cultures vivrières, il ne faut pas s’étonner que dans un premier temps les paysans viennent grossir les populations urbaines qui, à leur tour, devant la situation de plus en plus catastrophique, émigrent vers les pays du Nord. C’est une question de survie! Seules les multinationales, leurs actionnaires et autres spéculateurs, les classes dominantes et les gouvernants des pays “sous-développés” profitent de cette situation. Actuellement le détroit de Gibraltar devient un immense cimetière où se noient tous les jours des êtres humains fuyant la misère, la répression ou voulant tout simplement vivre ailleurs. Il y a quelques années beaucoup dénonçaient l’existence des boats-peoples flottant au large du Viêt-nam (par exemple Kouchner). On aimerait bien les entendre de nouveau à propos des embarcations de fortune qui essayent de franchir le détroit de Gibraltar! Jusqu’à présent les frontières ne sont pas ouvertes – au contraire, elles ont plutôt tendance à se refermer ! – et nos conditions de vie ne cessent de se dégrader : développement du chômage, de la précarité, de la misère, remise en cause d’acquis sociaux… C’est démagogique d’en faire reposer la responsabilité aux immigrés. Plus on durcira les lois concernant l’immigration plus on renforcera la précarité. En effet, l’Etat ne pourra jamais expulser tous les sans papiers, pour au moins trois raisons : - la première est d’ordre technique. Il faudrait une logistique telle (avions, charters, trains, bateaux), qu’il parait très difficile d’organiser des expulsions aussi massives - organiser l’expulsion de l’ensemble des sans papier supposerait le regroupement de milliers de personnes dans des camps d’une autre dimension que ceux que l’on connaît actuellement. En outre cela remémorerait des événements de notre passé peu glorieux - mais surtout la raison profonde est d’ordre économique. L’existence de sans papiers permet de renforcer la précarité de l’exclusion et donc de faire pression sur le marché du travail en faveur des capitalistes. Ainsi, lutter contre l’exclusion sociale et la précarité suppose de se mobiliser pour la régularisation globale de tous les sans papiers. Sous couvert de dignité, l’Etat réglemente les conditions de vie des personnes d’origine étrangère. En 1982 Badinter, alors ministre de la justice, crée les certificats d’hébergement pour, selon les dires du ministre, lutter contre les marchands de sommeil et autres exploiteur de la misère du Tiers Monde. La principale motivation du gouvernement de l’époque (Mauroy est à Matignon) est déjà de contrôler les flux migratoires. Debré, lorsqu’il était ministre de l’intérieur sous le gouvernement Juppé, n’a fait que prolonger cette disposition en imposant aux personne accueillant des étrangers de déclarer en plus leur départ. Cette disposition a été abrogée par le loi Chevènement. Ceci montre une chose : lorsqu’on prend des mesures spécifiques, même en se retranchant derrières des raisons humanitaires, par rapport à des catégories de populations particulières cela conduit très
souvent à la criminalisation de celles-ci. De même, la circulaire Sauvé/Marchand impose qu’un étudiant étranger puisse justifier de 2300 Frs par mois. Pourquoi les étudiants étrangers et pas les étudiants français ? Les français auraient-ils des capacités de survie plus importantes que les étrangers ? Il est évident qu’il est très difficile de survivre avec des revenus aussi faibles (le RMI impose aussi des logiques de survies : vols, travail au noir…). Pour obtenir des certificats d’hébergement il faut justifier d’un logement ayant un minimum de surface au sol, d’un minimum de pièces, etc. Certes il paraît difficile de vivre à 4 dans un studio ; mais c’est aussi vrai pour des personnes d’origine étrangère que pour des français ! La question n’est donc pas d’établir des planchers qui déterminent l’autorisation de séjour en France mais de lutter contre la misère dont sont victimes aussi bien des “Français de souche” que des personnes d’origine étrangère. Non les immigrés ne sont pas une des causes du chômage ! Non ils ne sont pas responsables de la casse des politiques sociales ! Non la dignité ne se construit pas avec la répression et les lois racistes! Il nous faut briser l’amalgame immigration/misère. La misère grandit en raison de la logique du profit qui prévaut sur toute autre considération. C’est à la misère qu’il faut s’attaquer, pas aux immigrés ! Cela suppose d'imposer un nouveau partage des richesses fondé sur l'égalité sociale et la solidarité. JC